Dossier Acta Litt&Arts : Épreuves de l'étranger

Olivier Thévenaz, Pierre Siegenthaler, Charles Guittard et Florian Barrière

Traduire Gérard Macé : Poésie

Texte intégral

Traduction Olivier Thévenaz – Rétrotraduction Pierre Siegenthaler

                                                  Traduction : Olivier Thévenaz

Antro exientes, simulacra admirabimur
per quae ire siccis pedibus olim uoluimus,
lymphae lacunas quae uaporant itinere,
lucisue telas ubi uidemus tot lacus.

Nullus prophetes, nullus iam Pharao ante nos,
nec mare Rubrum quod sponte sese ita adaperiat
ut feminarum labra, sed quiddam ultimum
quod regrediatur simul ac orbis finiens.

                                       *
Iam tela in pratis est niuis,
caelumque totum stet quasi
in cochleari argenteo,
solesque uel tres uel duo
ex Aztecorum quattuor.

Sol noster est hibernus
lucetque caedis in locum:
guttae cruoris, plumae auis
cenamne dis fuisse
an indicant serpenti?

                                       *
Tot nomina sub niue
expectant nitidos dies
ad radiandum ut aurum.

Totque exanimati in armis
uiderunt oculis suis peremptis
florida rura almaque post ferrea claustra belli.

                                       *
Montes umbriferi iam similes opposito die
sunt incudibus et sol fabricam hanc irradiat relictam.

Scintillas sapiens malleolo excutit
antiquas animas tundere gestiens

gentis quae soleas induerat ferricrepas equis
tunsis corneo odore – at sonipes solum iter intuens
directo ibat inops, oppositis ante oculos quidem
ipsis, quae sibi non ausi homines indere, operculis.

                                       *
 

 

                                                  Rétrotraduction : Pierre Siegenthaler

Hors de l’antre, admirons les spectres
de nos départs jadis projetés.
Pieds au sec, admirons les eaux
qui de vapeur se muent en voies
et les lumières qui s’ourdissent
où se révèlent tant de lacs.

Nul prophète ne nous fait face, nul pharaon,
nulle mer Rouge pour s’entrouvrir
comme des lèvres de femme,
juste un semblant de fin
qui au bout du monde
recommence.

                                       *
La toile des neiges
sur les prés se meut
et soudain siègent,
entiers, les cieux
comme dans l’image
d’un cuiller d’argent ;
et des soleils, par trois ou deux,
au firmament, parmi les quatre
astres aztèques.

Notre soleil, lui, est hivernal et luit
sur les lieux du crime :
plume d’oiseau, goutte de sang,
qui des dieux ou du serpent a rompu son régime ?

                                       *
Sous la neige, tant de noms
attendent de rejaillir
en rayons d’or aux beaux jours.

Dans leurs armes, tant de morts
de leurs yeux laminés virent
les fleurs des vallées finales
suivant la guerre et ses fers,
belliqueuses barricades.

                                       *
Vois ces monts qui, dos au jour, dans leur ombrage deviennent enclumes.
Dans le sillage du soleil, une forge âgée s’allume.

Ici martèle un sage, façonnant des étincelles.
Il frappe, fébrile, les âmes séniles d’une race ferreuse,

de ceux qui fixent aux canassons les sabots sonores dans l’odeur de corne.
Mais le cheval, regard au sol, fonçait tout droit sans qu’on califourchonne,
vue couverte et sans lucarne,
portant les œillères que les hommes s’épargnent.

                                       *
 

Traduction Charles Guittard – Rétrotraduction Florian Barrière

                                                  Traduction : Charles Guittard

E spelunca egredientes simulacra aquarum stagnantium uidebimus
quae nobis somniantibus fuit in animo pedibus siccis traicere,
lacunas quae cum procedimus euanescunt,
luminosa spatia ubi lacus conspiciuntur.

Nullus est uates, nullus pharaon Aegyptorum princeps qui nos antecedat
nullum mare Rubrum quod sua sponte nobis aditus det,
sicut labia muliebrium exteriora, sed remota spatia
eodem tempore quo orbis terrarum finiens retrocedentia.

                                       *
Sicut mantele nix in pratis
patet. Cunctum caelum
in argenteo cochleari iacere possit,
caelum et duo aut tres soles
e quattuor solibus ab Indis Mesoamericanis numeratis.

Sol hiemalis est super nos
qui in locis sceleribus pollutis fulget :
an sanguis stillans, an auium pennae
erant epulae deorum aut draconis cibus ?

                                       *
Tot sunt nomina niue operta
quae exspectant dies ubi sol ridet
ut nitore aurei fulgeant.

Tot sunt homines qui bello ceciderunt,
qui uoltu pauido flores conspexerunt sparsos in agris,
saeptis ferreis circumuenti.

                                       *
Montes in umbris inuoluti incudibus similes sunt
et sol illustrat hanc fornacem
ubi iam nemo laborat.

Scintillas philosophus quasi malleo utatur
elicit, qui res priscorum temporum obsoletas deleat.

Illo tempore soleae induebantur,
ungulis redolentibus, equis qui uerberabantur,
qui intentis oculis tantum prospicere poterant,
quia equorum oculi operimenta ferebant
quae ferre non audebant homines.

                                       *
 

 

                                                  Rétrotraduction : Florian Barrière

En sortant de la caverne, nous verrons les reflets de flaques
que nous rêvions de traverser à pied sec,
profondeurs qui s’évanouissent comme nous avançons,
plaines de lumière où l’on aperçoit des lacs.

Nul prophète, nul pharaon, prince d’Égypte, pour nous précéder,
nulle mer Rouge pour, d’elle-même, nous livrer passage,
comme les grandes lèvres des femmes, mais des recès
qui s’éloignent en même temps que l’horizon.

                                       *
Une nappe de neige dans les prés
s’étend. Le ciel immense
pourrait tenir dans une cuiller d’argent,
le ciel et deux ou trois soleils
parmi les quatre que comptent les Aztèques.

Sur nous, un soleil d’hiver
qui brille dans des lieux criminels :
une goutte de sang, des plumes d’oiseau
était-ce le festin des dieux ou le repas du dragon ?

                                       *
Tant de noms recouverts de neige
qui attendent les jours où le soleil rit
pour briller avec l’éclat de l’or.

Tant d’hommes tombés au combat
qui, le teint livide, ont contemplé les fleurs éparses dans les champs
au milieu des barbelés.

                                       *
Les montagnes, quand les ombres les enveloppent, sont pareilles aux enclumes
et le soleil éclaire cette forge
où personne ne travaille plus.

Le philosophe, comme s’il usait d’un marteau, fait jaillir
des étincelles, en détruisant les vestiges d’un autre temps.

Alors, les sabots étaient recouverts
de corne odorante, pour les chevaux battus
qui ne pouvaient regarder qu’en avant,
parce que leurs yeux portaient des œillères
que n’osaient porter les hommes.

                                       *
 

Pour citer ce document

Olivier Thévenaz, Pierre Siegenthaler, Charles Guittard et Florian Barrière , «Traduire Gérard Macé : Poésie», Acta Litt&Arts [En ligne], Acta Litt&Arts, Épreuves de l'étranger, Latin, mis à jour le : 20/03/2018, URL : http://ouvroir.ramure.net/revues/actalittarts/321-traduire-gerard-mace-poesie.

Quelques mots à propos de :  Olivier  Thévenaz

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Quelques mots à propos de :  Pierre  Siegenthaler

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Quelques mots à propos de :  Charles  Guittard

Traduction français-latin

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Quelques mots à propos de :  Florian  Barrière

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