Dossier Acta Litt&Arts : Épreuves de l'étranger

Kohei Kuwada, Jacques Lévy, Midori Ogawa et Thierry Maré

Traduire Gérard Macé : Poésie

Texte intégral

Traduction Kohei Kuwada – Rétrotraduction Jacques Lévy

                                                  Traduction : Kohei Kuwada

洞窟から出たとき、わたしたちは蜃気楼を目にすることになるだろう
ずっと昔から足を濡らすことなくそこを通過したいと願ってきた
歩みを進めると蒸発してしまう水だまりを
湖の見える光の広がりを。

先導してくれる預言者もファラオもなく
女の大きな唇のようにおのずから開いてくれる紅い海もなく、
ひとつの彼岸が、
水平線とともに後退していくばかりである。

                                       *
雪が降り、草原には一面
テーブルクロスが広がる。空全体は
銀の匙のなかに収まってしまうだろう
空と、アステカ文明が4つあると思っていた
うちの2つか3つの太陽が。

わたしたちの太陽は冬の太陽
犯行現場を照らし出す
滴る血液、鳥の羽
神々の宴があったのか
それとも蛇の食事だったのか?

                                       *
雪の下に埋もれたどれほど多くの名が
黄金のごとく輝くために
美しい日々を待ち望んでいることか。

戦場ではどれほど多くの死者が
その目で、その血走った目で、
鉄条網の向こうに花咲く田園の風景を見たことか。

                                       *
陽の光を背にした山々はまるで金床のよう
見捨てられたこの鍛冶場を太陽が照らしている。

そこでは哲学者の金槌が旧世界を打ちつけ
火花をとばしている。

それは蹄の匂いがする中で
馬に蹄鉄を打っていた頃のこと。打たれた馬たちは
人間にはとうてい身につける勇気のなかった
遮眼帯のおかげで、まっすぐに前を向いていた。

                                       *
 

 

                                                  Rétrotraduction : Jacques Lévy

Nous verrons en sortant de la grotte
Le mirage que nous avions depuis toujours rêvé de traverser sans nous mouiller
La flaque d’eau qui s’évapore à mesure que nous avançons
L’étendue de lumière où transparaît un lac

Sans prophète pour nous conduire ni pharaon
Sans mer Rouge qui s’ouvre telles les grandes lèvres d’une femme
Juste un au-delà
Qui recule avec l’horizon

                                       *
Il neige et une nappe
Recouvre toute la prairie
Le ciel pourrait tout entier tenir dans une cuiller d’argent
Le ciel et deux ou trois soleils
Parmi les quatre que comptait la civilisation aztèque

Le nôtre est le soleil de l’hiver
Qui éclaire le lieu du crime 
Sang qui goutte et plumes d’oiseau
Festin des dieux ou
Repas d’un serpent

                                       *
Combien de noms ensevelis sous la neige
Attendent les beaux jours
Pour briller comme l’or

Combien de morts au champ d’honneur
De leurs yeux injectés de sang
Ont-ils vu le champ fleuri derrière les barbelés

                                       *
Les montagnes à contre-jour sont pareilles à l’enclume
D’une forge abandonnée qu’illumine le soleil

Où le marteau du philosophe bat l’ancien monde
En faisant jaillir les étincelles

C’était au temps du ferrage quand
Dans l’odeur du sabot
Les chevaux fixaient droit devant eux
Grâce aux œillères que les hommes n’avaient pas le courage de porter

                                       *
 

Traduction Midori Ogawa – Rétrotraduction Thierry Maré

                                                  Traduction : Midori Ogawa

洞窟を出て、ぼくらは抱くだろう
いつも夢見ていた、足を濡らさずに渡る幻想を
前進するにつれ、蒸発する水たまりの中を
湖を覆う光の層の中を

前を歩む預言者も、ファラオもいない
巨大な女の唇のように
ひとりでに開く、紅い海もない
水平線とともに遠ざかる彼方があるだけだ

                                       *
雪が降ると、野原いちめんに
テーブルクロスが敷かれる。空全体が
銀のスプーンの中に入りそうだ。
空と、アズテカ人のいう
四つの太陽のうちの、ふたつかみっつも。

ぼくらの太陽は冬の太陽
犯罪現場を照らし出す
血のしずく、鳥の羽根
それは神々の祝宴だったのか
あるいは蛇の食事だったのか

                                       *
雪の下にはたくさんの名前
幸せな日々を待ち望んでいる
黄金のごとく輝くために 

同じ数ほどの戦死者たちの
その血走った瞳で見たのは
有刺鉄線の向こうの、花ざかりの田園

                                       *
逆光に映える山々は金床に似ている
打ち捨てられた鍛冶場を太陽が照らし出す

舞い上がる火の粉たち、それは古い世界を鍛える
哲学者の槌から躍り出る

人がまだ馬の蹄鉄を打っていた世界では
角の匂いの漂う中を、打ちのめされた馬たちが
まっすぐ前を見据えていた、人間たちが被ろうとさえしなかった
遮眼帯(ブリンカー)を付けられて

                                       *
 

 

                                                  Rétrotraduction : Thierry Maré

Au sortir de la caverne, nous saisira
le rêve de toujours, l’illusion de passer à pied sec
à mesure qu’on avance, dans les flaques où l’eau s’évapore
dans les couches de lumière qui recouvrent le lac

En tête de la marche aucun prophète ou pharaon,
comme les lèvres immenses d’une femme
ouvrant à lui seul une mer rouge absente :
rien qu’avec l’horizon le lointain qui s’éloigne

                                       *
La neige en tombant partout sur la plaine
met la nappe. Le ciel entier
tiendrait dans une cuillère en argent.
Le ciel et, diraient les Aztèques,
des quatre soleils au moins deux ou trois.

Notre soleil à nous, soleil d’hiver
illumine le lieu d’un crime
gouttes de sang, plumes d’oiseau
était-ce le banquet des dieux
ou le déjeuner d’un serpent ?

                                       *
Sous la neige beaucoup de noms
espèrent des jours de bonheur
pour briller à l’égal de l’or

A peu près autant de morts au combat
de leur prunelle sanglante ont vu
par-delà les barbelés la campagne en fleurs

                                       *
A contre-jour les montagnes ont l’air d’enclumes
forge à l’abandon par le soleil illuminée

tournent dans l’air des grains de feu, qu’en forgeant le vieux monde
les philosophes sous leur marteau font danser

on battait encore le fer à cheval dans ce monde
au milieu des odeurs de corne, les chevaux terrassés
droit devant eux braquaient les yeux, les hommes ne songeant à porter
les œillères qu’ils leur appliquaient

                                       *
 

Pour citer ce document

Kohei Kuwada, Jacques Lévy, Midori Ogawa et Thierry Maré , «Traduire Gérard Macé : Poésie», Acta Litt&Arts [En ligne], Acta Litt&Arts, Épreuves de l'étranger, Japonais, mis à jour le : 20/03/2018, URL : http://ouvroir.ramure.net/revues/actalittarts/344-traduire-gerard-mace-poesie.

Quelques mots à propos de :  Kohei  Kuwada

Traduction français-japonais

Du même auteur

Quelques mots à propos de :  Jacques  Lévy

Rétrotraduction japonais-français

Du même auteur

Quelques mots à propos de :  Midori  Ogawa

Traduction français-japonais

Du même auteur

Quelques mots à propos de :  Thierry  Maré

Rétrotraduction japonais-français

Du même auteur