Dossier Acta Litt&Arts : Perspectives institutionnelles
La question des valeurs dans l’enseignement de la littérature est-elle compatible avec les orientations et apprentissages de la discipline ?
Résumé
Depuis quelques décennies, l'histoire littéraire est revenue à l'ordre du jour, et la question des valeurs avec elle. Mais comment pouvoir « enseigner en se préoccupant des valeurs » si, par ailleurs, on se garde de toucher aux pratiques de classe, aux corpus, si on ne modifie pas les exercices d'usage (commentaire composé et dissertation) qui n'ont cure de cette « préoccupation » ?
Abstract
For a few decades, the literary history has been back on the agenda, and the question of values along with it. But how can you possibly "teach and feel concerned with values" if, besides, you carefully avoid changing the classroom practices, the school curricula, if you do not modify the exercises commonly used (commentary and essay) which take no heed of this "concern" ?
Texte intégral
Introduction
1En mai 68, avait surgi une question iconoclaste, et depuis fort oubliée : « D'où tu parles ? » Question inédite, pertinente, mais tacitement refoulée dans tous les discours qui affichent une neutralité mensongère, une impossible impersonnalité. Pas d'énoncé sans énonciation, et donc, puisque mon statut officiel (professeur de littérature) ne saurait suffire à rendre compte de ce que je vais dire (et des raisons de le dire), je préciserai donc brièvement « d'où je parle ». Non de l’Université (où je suis étiqueté « spécialiste de Stendhal »), mais du terrain qui a toujours été le mien : l’enseignement.
2Après mes études de lettres, après un passage au lycée, j’ai enseigné dans un Centre pédagogique régional au Maroc (formateur de formateurs pendant une dizaine d’années), au collège (7 ans) ensuite, puis à l’université durant deux décennies (où j’ai assuré tous les cours : L1, L2, L3, Master I et II, et préparation aux concours CAPES et agrégation). Et j’ai aussi, et surtout, enseigné dans le même temps et longtemps (plus de 20 ans) en formation continue où j’ai pu constater, auprès de stagiaires en situation d’échec au collège et au lycée, les effets pervers, les manques et dégâts de l’enseignement initial en français. Et ce sont les leçons tirées de mes quarante années d’enseignement (1977-2017) qui nourrissent les présentes réflexions.
3La remise en cause des approches formelles dans l’approche des textes a conduit et à la promotion du « sujet lecteur » et à « la question des valeurs » dans l’enseignement des textes. On peut se demander toutefois si « le tournant éthique » peut être acclimaté, peut vraiment entrer dans les classes, dans la mesure même où les programmes, l’impérialisme du formalisme, les présupposés de la « lecture littéraire », ainsi que la nature des épreuves aux examens, se conjuguent pour mettre en œuvre un quadruple déni des valeurs :
1 ) Le panthéon scolaire donne la préférence aux textes les moins engagés dans le siècle, les moins politisés, les moins idéologiques, les plus « intemporels ». Les textes engagés n’ont pas bonne presse à l’école, où l’on étudie la poésie, le roman, le théâtre, mais non l’essai, les textes à thèse, tous les écrits qui défendent des points de vue, des valeurs. Les œuvres au programme ne sont pas de celles qui mettent en avant la polémique, l’épineuse, l’indésirable « question des valeurs » ;
2) Formalisme, pas mort. Même si l’histoire littéraire est revenue dans les I.O. et les programmes, dans les faits, le prisme narratologique (les focalisations, l’analepse et la prolepse font partie des savoirs impérativement requis), les incontournables figures de style, et les commentaires qui, invariablement mettent l’accent sur le style, l’esthétique (aux dépens du social, du politique, de l’historique, de l’éthique) font toujours la loi dans les manuels, les classes, les amphis, les sujets d’examens et de concours (d’où la cote exceptionnelle des textes poétiques dans les cours de français et les épreuves d’examens) ;
3) Du collège au lycée, on invite les apprenants à passer de la « lecture ordinaire », naïve, affective, référentielle, éthique, à la « lecture littéraire », avertie, informée, savante, distanciée, critique, intellectuelle, et cette pratique professorale de la lecture, qui impose de refouler le régime normal de lecture du « lecteur ordinaire » (sujet lecteur scolairement prié de mettre entre parenthèses ses sentiments, ses opinions, sa morale, sa vision du monde), se traduit par des approches et interprétations qui, fatalement, minimisent le contenu social, historique, idéologique, éthique, des textes, qui réduisent à rien « la question des valeurs » ;
4) Last but not least, les épreuves aux examens verrouillent l’enseignement de la littérature au lycée, et il se trouve que, par nature, la dissertation et le commentaire littéraire sont des exercices qui préviennent, voire interdisent que « la question des valeurs » puisse être vraiment posée.
I. Les valeurs à l’école : une vieille histoire
4Fût-on un formaliste pur et dur, un textolâtre impénitent, parler de littérature, c’est toujours, et nécessairement, parler de « valeurs ». Même s’il n’est pas dans mon propos d’entrer dans des discussions théoriques, philosophiques, sur la question des valeurs, il importe sans doute de redire que l’introduction de la littérature dans les classes a partie liée avec les valeurs. Fondamentalement. Nécessairement. Il est de bon ton d'ironiser sur la manière forte dont l'École de Jules Ferry avait assujetti l'histoire et la littérature à ses objectifs politiques, il est aisé de repérer et de mettre au jour les grosses ficelles idéologiques du roman national, les motivations de l’invention des héros (Vercingétorix ou Jeanne d’Arc) du panthéon, et tous les ingrédients de la morale laïque inculquée par les bataillons des « hussards noirs » (Péguy) de la IIIe République, mais l’histoire ne fut pas la seule matière à être ainsi embrigadée, instrumentalisée, la philosophie (dans la lignée de Victor Cousin) le fut aussi, tout comme le fut, et l'est encore, la littérature.
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1 R. Barthes, « Réflexions sur un manuel » (1969), dans Essais critiques IV. ...
5De fait, dans les classes ou les amphis, en dépit de tous les discours qui visent à masquer cette évidence patente, aucun texte n'est étudié pour des qualités intrinsèques, pour une valeur qu'il aurait in se (laquelle ?). Pas plus que l'histoire ou la philosophie, la littérature ne peut pas ne pas servir d'autres fins que le savoir pur, « désintéressé ». Pour sembler moins utilitaire que les maths, la chimie ou l'économie, la littérature dans les programmes n'en est pas pour autant inutile, étudiée « pour rien ». La culture gratuite, le texte gratuit, cela n'existe pas à l'École. « La littérature, c’est ce qui s’enseigne1 », mais l’enseignement est fort loin d’enseigner toute la littérature. On enseigne certains textes seulement, ceux qui ont « une valeur éducative », ceux qui vont dans le sens de la morale commune, humaniste, « citoyenne », comme l’on dit aujourd’hui. Et, de surcroît, ces textes « choisis », on les enseigne d’une certaine manière.
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2 Cf. Y. Ansel, De l’enseignement de la littérature en crise. Lire et dé-lire...
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3 Voir l’article en ligne d’A. Welfringer, « Poétique d’un sous-genre critiqu...
6Archétypal exemple de l'instrumentalisation des textes du passé : l’extraordinaire postérité de Molière, écrivain courtisan devenu un auteur totémique de la Liberté, de l’École de la République, au prix de multiples erreurs cultivées, de sidérants tours de passe-passe2. Toutefois, le plus beau cas d’école est sans nul doute La Fontaine, dont certaines fables, très connues de nos grands-parents et parents, le sont moins aujourd’hui. Si la gloire scolaire de La Fontaine a décliné durant la période 1970-2000, la perte de l'éclat n'en revient pas à l'auteur qui n’en peut mais : ce ne sont pas ses textes qui ont changé, mais l'École, qui en a eu moins besoin. Dans l'école de la IIIe République, les Fables ont pu devenir les textes fétiches des écoles communales de la France profonde, parce que, dans ces Fables, l’univers champêtre de La Fontaine (le monde de la campagne, avec des loups, des chiens, des chats, des ânes, du thym, une belette, un héron au long bec, un lièvre qui songe en son gîte, etc. ; un univers de vieux métiers : bûcheron « tout couvert de ramée », laboureur, meunier, jardinier, savetier, berger, etc.) et sa morale frileuse (il faut rester les pieds sur terre et à sa place) étaient « miraculeusement » ajustés et aux desseins de l’École républicaine et à la dominante rurale de la population française qui, ne faisant guère de grandes études, s’arrêtait au certificat d’études primaires (le très prestigieux « certif » : l’instauration de l’école obligatoire jusqu’à 16 ans ─ loi de J. Berthoin en 1959 ─, la généralisation de l’entrée au collège ont déclassé La Fontaine). Après-guerre, la population française habite plus la ville que la campagne, mais inertie culturelle aidant, La Fontaine fait encore de l’usage bien après 1945, jusqu’à ce que l’exode rural et l’entrée dans la société de consommation (les Trente Glorieuses) laminent « son » public, sapent progressivement son succès scolaire. Et c'est alors que – conjonction remarquable, et fort riche d'enseignements – le statut du poète va changer, et sa « lecture » aussi. Puisque La Fontaine cesse d'être captif du rôle que l'institution lui faisait jouer à l'école primaire-secondaire, ses récits moraux ont pu alors être retournés, habillés pour un autre destin : La Fontaine « dé-moralisé » est devenu libre d’être lu n’importe comment, sans aucune autre finalité que de donner lieu à des interprétations inouïes. Et le fabuliste de se trouver un temps ausculté, décortiqué, mouliné par les sémioticiens, stylisticiens et poéticiens, lesquels, délaissant le message apparent (décrété secondaire, sans intérêt), vont, naturellement, interpréter « à plus hault sens », les lire comme jamais encore on n’avait songé à le faire3. Et c’est ainsi que les transparentes Fables vont cesser de l’être, les doctes commentateurs se donnant le mot pour oublier la lettre claire, égarer la signification, « la petite fable » si chère à Péguy.
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4 Cf. G. Plissoneau et A. Vibert, « La littérature d’idées appartient-elle à ...
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5 Cf. Y. Ansel, Albert Camus totem et tabou. Politique de la postérité, PUR, ...
7Moralités ? Qu'elles servent à délivrer une morale laïque, qu'elles soient mobilisées pour mettre en œuvre des théories littéraires herméneutiques, ou qu’elles reprennent du service, soient pédagogiquement reprises, mobilisées (la mise au programme de l’argumentation a redonné une nouvelle jeunesse aux fables, didactiquement transformées en apologues modèles dans les années 20004), dans tous les cas, les Fables de La Fontaine sont pareillement asservies aux diverses finalités qui leur sont assignées. Interprétation et instrumentalisation, usage et mésusage ne sont jamais séparables. Et ce qui vaut pour La Fontaine vaut évidemment pour tous les auteurs enseignés. Les écrivains patrimoniaux sont sélectionnés, traités, fabriqués, utilisés, enrôlés dans les programmes scolaires et culturels pour servir maints objectifs extra-littéraires : politiques, patriotiques, historiques, idéologiques, économiques, éthiques, stratégiques, philosophiques, touristiques, théoriques, didactiques5...
II. D’un nouveau discours sur la lecture : haro sur les idées, les valeurs
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6 Voir l’ouvrage fondamental d’Anne-Marie Chartier et Jean Hébrard, Discours ...
8Sans revenir sur la généalogie des « discours sur la lecture6 », il me suffira de rappeler que, en dépit de l’inflexion des orientations ministérielles (il y a eu un virage avec les programmes de 2002 pour le cycle 3, les programmes de 2009 pour le lycée professionnel, de 2008, 2015 pour le collège, et 2010 pour le lycée général, mais ce changement reste sans grands effets en pratique pour la prise en compte des idées, des valeurs), l’actuel discours dominant sur les textes est toujours intimement lié au « tournant linguistique » des années 70. Le discours qui prévaut dans les classes hérite des approches formelles, lesquelles laissent de côté tout ce qui rattache les œuvres à la vie en société, à l’histoire des hommes, aux mentalités, aux valeurs. De ce point de vue, rien de plus révélateur que le panthéon des manuels qui traitent de « la critique littéraire », id est de « la critique des professeurs » (A. Thibaudet), faite par des professeurs pour des professeurs. Que ce soit dans l’ouvrage de J.-Y. Tadié (La critique au XXe siècle, Agora, 1985) ou dans celui d’A. Compagnon (Le démon de la théorie, Seuil, 1998), dans le « Que sais-je ? » de M. Jarrety (La critique littéraire française au XXe siècle, PUF, 1998) ou de P. Brunel (La critique littéraire, PUF, 2001), ou encore dans les usuels destinés aux étudiants (A. Maurel, La critique, Hachette, 1994 ; Fr. Thumerel, La critique littéraire, A. Colin, 2002), dans toutes ces synthèses prétendument objectives (« neutralité axiologique » oblige !), la ritournelle est la même, le palmarès sans surprise : l’ivraie (absente, tacitement censurée), ce sont tous les noms et concepts du côté de l’histoire, de la sociologie, de l’étude des mentalités et des valeurs, le bon grain, ce sont les théories formalistes, idéalistes, qui refoulent, escamotent le référent, les enjeux humains et sociétaux des œuvres, qui oblitèrent tout ce qui n’est pas thèmes universels, psychologie éternelle (la nature humaine, toujours pas morte) et formes esthétiques transcendantales.
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7 Pour ne prendre qu’un exemple emblématique, dans « L’Albatros », sont pris ...
9En conséquence de quoi, les étudiants ou futurs enseignants peuvent tout ignorer des sciences humaines (en particulier la sociologie), quand il ne leur est pas permis d’ignorer l’existence et le nom des figures de rhétorique, de ne pas connaître les termes usinés et mis à la mode par la linguistique ou la terminologie de la narratologie. Les raisons de cette situation sont évidentes : dans les cours de littérature, la question des valeurs idéologiques et morales se pose peu dans la mesure même où le discours officiel dominant (expression de la « communauté interprétative » dominante) continue d’impliquer leur mise entre parenthèse7.
10Les théories récentes du sujet lecteur, qui commencent à informer certaines pratiques, ne sont pas une garantie non plus d’un débouché vers le questionnement critique des valeurs : surtout si ce déplacement vers la subjectivité se met à dériver vers une forclusion de l’auteur et de l’histoire littéraire.
11Avec des étudiants (lettres, L2, L3), j’attaque l’étude des contes par ceci :
8 Elena Gianini Belotti, Du côté des petites filles (1973), éd. des Femmes, 2...
Le petit chaperon rouge est l'histoire d'une fillette à la limite de la débilité mentale, qui est envoyée par une mère irresponsable à travers des bois profonds infestés de loups pour apporter à sa grand-mère malade des petits paniers bourrés de galette. […] Blanche-Neige est une autre petite oie blanche qui accepte la première pomme venue, alors qu'on l'avait sévèrement mise en garde de ne se fier à personne. […] Cendrillon est le prototype des vertus domestiques, de l'humilité, de la patience, de la servilité, du « sous-développement de la conscience », elle n'est pas très différente des types féminins décrits dans les livres de classe aujourd'hui.8
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9 Cf. Y. Ansel, « Pour une socio-politique de la réception », Littérature, n°...
12Je joue de cette provocation, à la fois pour délaisser la perspective narratologique usuelle dans l’étude des contes, et pour susciter le débat (le sexisme dans les contes et les œuvres du patrimoine littéraire). C’est une façon aussi de montrer qu’une lecture « personnelle » (et celle d’E. G. Belotti l’est, ô combien !) est toujours en même temps datée, idéologique, politique historique9, collective. Le point de vue exprimé par E. G. Belotti en 1973 n’est pas concevable, n’est pas pensable au XVIIIe ou au XIXe siècle ; il a fallu que changent les mentalités et le regard porté sur les textes du passé, il a fallu le féminisme, le mouvement de libération des femmes, les réflexions sur « la condition féminine », pour que les contes puissent être vus/lus dans cette optique-là, évidemment genrée (ce n’est pas un hasard si c’est une femme qui voit ce qu’elle voit dans les contes, qui écrit ces lignes).
13Grand étonnement d’apprenants formatés formalisme, peu préparés à entendre un tel son de cloche. Car, comme nul enseigné ne l’ignore, ce qui compte dans les contes, c’est le schéma actantiel. Entre les murs de l’École, l’analyse d’E. G. Belotti est incongrue, irrecevable. Et pourquoi cela ? C’est que, précisément, c’est là un discours qui s’intéresse au contenu, à l’idéologie des contes, aux insidieuses valeurs véhiculées par ces vieux récits. Pour être claire, implacable, aussi plaisante qu'évidente, la démonstration n’en est pas moins déplacée, parce que non « scolairement correcte ». C’est que nous sommes ici en présence d'une critique « partiale, passionnée, politique » (pour reprendre les mots mêmes de Baudelaire), de cette sorte de critique qui, justement, n’a pas cours dans les cours.
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10 Exception à la règle, le sujet de composition française (CAPES lettres, 20...
14Traiter des valeurs dans l’enseignement de la littérature, cela fait désordre, cela ne fait pas partie du programme. Et il ne suffit pas d’introduire comme objet d'étude dans les programmes l'argumentation ou « la littérature d'idées » (question bête : existerait-il une littérature sans « idées » ? !) pour modifier l’état des lieux. Car, faut-il le dire, ni le CAPES ni l'agrégation, concours qui cadenassent et aiguillent toute la formation des futurs professeurs de lettres, ne prisent « la littérature d'idées », tacitement bannie des cours et examens. Dans les programmes de littérature, ce ne sont jamais les écrits journalistiques, politiques, polémiques ou philosophiques, des « grands auteurs » qui sont choisis, mais toujours leurs œuvres littéraires (plus celles-ci sont « désengagées », mieux c’est) puisqu'il est entendu que les écrivains sont « grands » par la forme, le style, non par leurs convictions, leurs combats. De mémoire d’Annales, pas plus au CAPES qu’à l’agrégation, aucun sujet n’a jamais porté sur les idées, les valeurs10. Au vrai, les étudiants n’ont jamais droit à un véritable enseignement dans ces domaines :
11 G. Plissoneau et A. Vibert, « La littérature d'idées appartient-elle à la ...
Tous les enseignants qui ont accepté de répondre notent qu'ils n'ont reçu aucune formation spécifique pour aborder les genres argumentatifs et la littérature d'idées, constat révélateur si ce n'est d'une absence totale de formation, du moins de son caractère si parcellisé qu'il ne saurait être identifié. Avoir lu Montaigne en licence ou suivi un cours sur l'argumentation à l'IUFM ne vaut effectivement pas pour une formation.11
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12 Le lecteur trouvera arguments, exemples et analyses dans De l’enseignement...
15Et c’est bien pourquoi l’introduction des valeurs en classe questionne (au sens fort du terme) l’actuel enseignement de la littérature, tel qu’il se trouve dans les modèles théoriques, les outils mobilisés, et, in fine, dans la manière dont sont présentés, légendés, annotés, commentés, dénaturés, les œuvres et extraits d’œuvres dans les études universitaires, les ouvrages périscolaires, les manuels, les histoires de la littérature, les dictionnaires, les encyclopédies et sites Internet. Ne pouvant entrer dans le détail des probantes preuves12, je me bornerai à n’évoquer que les deux exercices phares de notre discipline : la dissertation et le commentaire littéraire.
III. De la dissertation, du commentaire littéraire, et des valeurs
16Dans les épreuves écrites du bac français, il y a la dissertation (également appelée « essai littéraire », « composition française »), et le « commentaire de texte », exercices auxquels on a récemment adjoint « l’écriture d’invention » (vieille nouveauté, redécouverte de très anciennes pratiques pédagogiques : voir L’Enfant de Vallès), que je laisse délibérément de côté, les modalités de « l’écriture d’invention » n’étant pas directement liées à mon propos.
La dissertation
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13 Claude Lévi-Strauss, Tristes tropiques, Plon, 1955, p. 55.
17En principe, une épreuve qui mobilise des idées, des opinions, et donc est en prise directe sur la question des valeurs. Mais on sait bien ce qu’il en est : d’une part, les questions posées ne portent que sur « des sujets littéraires », ce qui, il faut le reconnaître, limite sérieusement le champ des interrogations ; d’autre part, l’exercice est purement rhétorique : c’est une parodie de discussion, de réflexion, où il importe surtout de ne pas prendre parti (dans le cahier des charges de l’exercice figure d’ailleurs en bonne place l’éviction de la première personne, l’obligation de recourir à toutes les formes « impersonnelles » du discours : lycéens et étudiants sont tenus de brider leur subjectivité, de bannir le « je » haïssable, de se cacher sous un « on » et un « nous » consensuel), et, sur ce point, il n’y a strictement rien à ajouter au célèbre développement (jamais suivi d’effets) de Cl. Lévi-Strauss dans Tristes tropiques13. Ne savent pas « faire la dissertation » ceux qui croient qu’il s’agit, sur un sujet donné, d’énoncer des opinions, de mettre certaines valeurs au-dessus des autres, ceux qui croient qu’il s’agit d’un exercice où l’on pourrait donner son point de vue « personnel ». Ceux-là ont tout faux. Car c’est qu’il faut s’arranger pour que, quelle que soit la question (au demeurant, jamais vitale, toujours « esthétique »), tout finisse par s’arranger, par s’équilibrer dans un juste-milieu (bien se garder d’avoir un avis tranché) de bon ton et de bon goût (toujours éviter d’appeler un chat un chat). En dépit des apparences, la « dissertation » n’a donc rien à voir avec la discussion, le débat, la controverse, avec les irréductibles conflits des valeurs inhérents à la vie de la cité.
Le commentaire composé
18Si le bac de français a connu quelques menus réajustements au cours du dernier demi-siècle, le commentaire littéraire, lui, a échappé à toute mise en examen. En France où les pétitions d'intellectuels sont un sport national, il ne s'est jamais trouvé une seule plume pour s'étonner de l'existence et de l'importance de cet exercice « monstrueux » – une merveille d'invention tératologique dans le genre : le but n'est plus d'expliquer le texte proposé, mais de dégager des « axes de lecture » et d'organiser une interprétation « personnelle » enchâssée dans le moule d'un plan étagé – dans l'enseignement du français. Une intrigante immunité qui mérite réflexion : pourquoi cet exercice-là – le plus vain, le plus détesté des enseignés et aussi des enseignants mis à la peine pour faire apprendre les subtilités et utilités d'une telle épreuve – traverse-t-il impunément les décennies ? Autant le résumé (exercice formateur, sérieux, et, comme tel, réservé aux concours scientifiques) n'avait en son temps nul besoin de justification, autant l'existence même du commentaire littéraire fait question.
19Au lycée, la vénérable explication de texte a disparu au profit de la « lecture méthodique », relayée par la « lecture analytique », et ce pour répondre aux exigences d'une épreuve du bac, apparue en 1972 : le « commentaire de texte » (ultérieurement rebaptisé « commentaire composé », puis « commentaire littéraire » en 1994). Il ne s'agit plus d'expliquer le texte ligne à ligne (objectif de « l’explication de texte », toujours d’usage à l’Université), mais de dégager des « axes de lecture », de faire des « hypothèses de lecture » et de bâtir un plan qui organise ce que la « lecture personnelle » du candidat a jugé digne d'intérêt :
En séries générales, le candidat compose un devoir qui présente de manière organisée ce qu'il a retenu de sa lecture, et justifie son interprétation et ses jugements personnels. En séries technologiques, le sujet est formulé de manière à guider le candidat dans son travail » (I.O.).
20Même si le plan en trois parties n'est pas expressément exigé, la « composition » est la marque distinctive du commentaire littéraire, ce qui rapproche celui-ci de la dissertation française.
21Mais pourquoi inventer le commentaire composé ? Que vaut l’exercice ? C'est la question qui fâche, et qui donc n'est jamais posée. Le discours officiel, les didacticiens, les enseignants, se gardent bien de s'interroger sur les finalités de l'exercice, sur sa valeur formative. On feint de croire que le commentaire littéraire sert à quelque chose. Mais à quoi donc ? Si l'exercice apprenait à lire, cela se saurait : les bacheliers qui arrivent à l'Université ne seraient pas aussi faibles, incompétents, démunis devant les textes. En réalité, faire des commentaires littéraires ne sert vraiment à rien d'autre qu'à ceci : répondre à la demande de l'institution, apprendre à acquérir une « compétence » sans aucune utilité hors de l’École. La seule excuse de l'exercice, c'est qu'il existe, qu'il est imposé, parce que, pour le reste, il ne saurait améliorer « les compétences lectorales » des lycéens et étudiants. Et il ne le peut pas parce que si l'explication de texte impose de répondre à la question de base : « que dit le texte ? qu'y a-t-il à comprendre, à expliquer ? », le commentaire littéraire, lui, conduit l’apprenant à se poser de tout autres questions : « qu'est-ce que je vais bien pouvoir dire sur ce texte ? combien d'axes de lecture trouver, et lesquels ? ». Et, surtout : « quel plan faire ? » Ce sont ces interrogations-là qui orientent, qui guident la « lecture » en vue du discours à produire, et non ce que peut bien dire, signifier le texte !
22Le plus révélateur dans cet immodeste exercice (devoir « composer » revient à décomposer de très grands textes très travaillés, très composés. Mais comment diable mieux « composer » que Flaubert ou Baudelaire ? !), c’est son apparition (à quelles nécessités répond-il ?) et sa sidérante promotion. Après 1968, l’instauration des trois épreuves aux écrits du baccalauréat de français voit apparaître un nouvel exercice : le résumé (ou analyse) + discussion, qui constitue le sujet de type I. Plus adaptée au nouveau public scolaire, l'épreuve est prise, et continûment, par la très grande majorité des candidats, aux dépens des sujets de type II (le commentaire composé) et III (la dissertation). Le résumé-discussion a été victime de son éclatant succès, qui déclassait les deux autres épreuves, victimes d'une concurrence qui montrait clairement où se portaient les choix des lycéens. Pour sauver le commentaire et la sacro-sainte dissertation, pour forcer la plume des élèves, l'institution a tranché (et dans le plus mauvais sens) : elle a supprimé l'épreuve qui avait la faveur des candidats. En 1994, le résumé-discussion disparaît donc des tablettes, est fugitivement remplacé par une « étude de texte argumentatif », avant qu'une autre réforme (1999-2001) n'enterre pour de bon le « texte argumentatif » et ne donne plus le choix aux candidats qu'entre trois « travaux d'écriture » archi-classiques : un commentaire littéraire, une dissertation, une écriture d'invention (à partir d'un corpus de textes littéraires).
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14 Voir à ce propos l’article en ligne de Fl. Boulerie, « Le Traité sur la to...
23Dans les programmes de français au lycée, c'est donc le résumé, exercice innovant, formateur, rigoureux qui a fait les frais des épreuves du bac, tandis que la dissertation littéraire a imperturbablement continué sa longue carrière et que le commentaire composé/littéraire n'a jamais vu son existence invalidée, ni même simplement remise en cause. Le commentaire littéraire est immunisé, soustrait à toutes les critiques, parce qu'il est une invention en phase avec la nouvelle population scolaire (il est infiniment plus facile de « commenter » un texte que de le comprendre), et ce qui se trame à l'Université, dans la formation des étudiants et des enseignants, parce qu'il est un produit de cet enseignement-là, partant un exercice tout à fait approprié pour cet enseignement-là. Et dans cet enseignement-là, la vertu pédagogique du commentaire n’est nullement dans l’explication (ce n’est guère la finalité de l’exercice), mais dans les choix de textes qu’il détermine et les dérives interprétatives qu’il autorise : si tout peut être expliqué (aucun mot, aucune phrase, aucun énoncé n’est sans implicite), tout ne peut pas être commenté. Dans la pratique en effet, le commentaire oblige à privilégier des textes qui ne soient pas des textes à idées (a priori non conformes, peu susceptibles de se prêter aux règles du jeu), mais des textes non engagés, non thétiques, mais esthétiques. La question a souvent été posée : et si Freud n'avait pas été aussi cultivé, et si Freud n'avait pas connu la tragédie de Sophocle, aurait-il pu trouver, inventer « le complexe d’Œdipe » ? Dans cet ordre d'idée, il est permis de se poser cette autre question : et s'il n'y avait pas la poésie, aurait-on pu inventer la lecture littéraire ? Si la poésie n'existait pas, la critique des professeurs et le structuralisme l'auraient inventée, pour leurs propres besoins. Tout comme la description et le portrait font l'objet d'une grande consommation dans les cours parce que ceux-ci sont de bons pourvoyeurs de passages détachables, autonomes, la poésie constitue une réserve prête à l’emploi, un ample stock de textes pour les enseignants dans l'obligation de trouver des extraits ad hoc pour la lecture analytique ou le commentaire littéraire. En théorie, certes, rien n'empêche les enseignants de donner à commenter toutes sortes de textes, ce que le B.O (28.07.1994) tient à préciser : « l'épreuve [le commentaire littéraire] porte sur un texte relevant des divers genres littéraires (poésie, théâtre, récit, littérature d'idées...) ». Oui, mais sauf que… Sauf que dans la pratique, il s'avère délicat, arbitraire, voire impossible, de faire un commentaire littéraire sur une lettre persane de Montesquieu, une entrée du Dictionnaire philosophique, un passage du Génie du christianisme, de Racine et Shakespeare, du Manifeste du surréalisme ou du Deuxième sexe, parce que, par nature, les textes à idées font de la résistance, ne conviennent pas du tout. Ils ne font pas l'affaire parce que, si importante que soit la forme dans ces textes stylés, c'est quand même toujours le fond qui compte le plus. Ils ne font pas non plus l'affaire parce que, dès lors que l'on veut convaincre, le sens même de ce que l'on écrit n'a pas intérêt à être équivoque, pluriel, indécidable, « poly-isotopique », poétique, etc. Les théories du jour qui mettent en avant la « coopération », la « liberté », voire « la co-création du lecteur » (sic), ont besoin de textes flous, sinon d’une obscure clarté (que celle-ci soit effective ou expressément forgée par les commentaires inspirés). Or les essais, les textes à thèse limitent drastiquement les marges de manœuvre du lecteur, assujetti au sens du propos, invité à ne pas passer les bornes de l’austère lettre, sommé de ne pas surinterpréter, textrapoler. L'idée même de « faire des hypothèses de lecture » ou de mettre en avant « le sujet lecteur » sur cette sorte de textes est absurde, un non-sens pédagogique puisque si la signification des passages à « commenter » pouvait donner lieu à plusieurs « hypothèses de lecture personnelles », cela voudrait dire que l'auteur n'a pas été assez clair, a échoué dans sa volonté de faire passer son message ! Il n'y a donc pas lieu de s'étonner si les textes polémiques, argumentatifs (par définition, défenseurs de valeurs contre d’autres valeurs) sont oubliés, dévalués, écartés, dans l'enseignement du français14, tandis que les textes poétiques (sans enjeux majeurs : les poèmes scolarisés donnent dans les thèmes éternels consensuels, chouchoutés par l’École : l’amour, la vie, la mort, l’ennui...), eux, se taillent une fort belle part.
Conclusion
24Naguère, l’histoire littéraire est revenue à l'ordre du jour, et la question des valeurs avec elle. Mais quid du corpus, lequel élimine précisément textes à thèse qui sont autant de défenses et illustrations de valeurs ? Le panthéon scolaire n'aime rien tant que les œuvres qui peuvent se présenter comme « au-dessus de la mêlée », inactuelles, intemporelles. Cela étant, pour changer la donne, les présupposés et principes qui sous-tendent la présence (et l'absence) des auteurs dans les panthéons scolaires seraient à interroger, à revoir.
25Mais les corpus, les contenus, les dispositifs, les postures, les programmations et programmes mêmes ne sont sans doute pas ce qui déréalise, dévitalise – et, par là même, dénature, « dé-valorise », « dé-moralise » – le plus les textes étudiés, et qui, de facto, empêche d'« enseigner en se préoccupant des valeurs ». On n'aura garde d'oublier en effet ce qui, pour les apprenants, matérialise, caractérise, signe la discipline : les questionnaires des manuels, les évaluations, les contrôles, les épreuves du bac, les examens de fac. Et, c'est surtout à ce niveau-là que le bât blesse, car, quels que soient par ailleurs les amendements que l'on pourrait apporter au corpus, les bonnes intentions, les modifications des postures pédagogiques, aussi longtemps que l'on ne touchera pas aux hiérarchies et pratiques hégémoniques, aussi longtemps que l’étude des textes argumentatifs sera quasi inexistante, aussi longtemps qu’existera le commentaire composé/littéraire (un exercice de haute voltige qui, par nature, valorise les textes esthétiques, poétiques, exige de finir toujours en beauté, puisqu’est présupposé que le fin mot de la littérature est : « À fond la forme ») et perdurera l’intouchable dissertation littéraire (qui incline les esprits à penser qu'au fond tous les conflits sont solubles dans l’harmonie des contraires, que toutes les questions trouvent leur résolution dans un irénique compromis – la fameuse partie III du « plan dialectique » – qui met toutes les valeurs antagonistes d'accord), « l'investissement éthique » relèvera d'une idée en l’air.
26De fait, comment pouvoir « enseigner en se préoccupant des valeurs » si, par ailleurs, on se garde de toucher aux pratiques de classe en vigueur, si on ne modifie pas les exercices et examens d'usage qui, c'est le moins que l'on puisse dire, préviennent cette « préoccupation » ?
Notes
1 R. Barthes, « Réflexions sur un manuel » (1969), dans Essais critiques IV. Le bruissement de la langue, Seuil, 1984, p. 49.
2 Cf. Y. Ansel, De l’enseignement de la littérature en crise. Lire et dé-lires, L’Harmattan, 2018, p. 211-215.
3 Voir l’article en ligne d’A. Welfringer, « Poétique d’un sous-genre critique : l’explication de fable de La Fontaine », Fabula-LhT, n° 3, 2007 [URL : http://www.fabula.org/lht/3/whelfringer.html], qui traite de huit microlectures de fables de La Fontaine parues dans la revue Poétique (entre 1983 et 1997).
4 Cf. G. Plissoneau et A. Vibert, « La littérature d’idées appartient-elle à la culture commune ? », dans Enseigner les « classiques » aujourd’hui, I. de Peretti et B. Ferrier dir., P.I.E. Peter Lang, Bruxelles, 2012, p. 85-87
5 Cf. Y. Ansel, Albert Camus totem et tabou. Politique de la postérité, PUR, 2012, p. 9-24.
6 Voir l’ouvrage fondamental d’Anne-Marie Chartier et Jean Hébrard, Discours sur la lecture (1880-2000), Fayard-BPI, 2000.
7 Pour ne prendre qu’un exemple emblématique, dans « L’Albatros », sont pris en compte surtout la facture des vers, la beauté des images, les sonorités, le style, la facture du sonnet, non ce que dit expressément (nul besoin de lire entre les lignes où il n’y a que du blanc) le sonnet (le poète incompris infiniment supérieur à la basse masse, évidemment, forcément, bête et méchante), non les présupposés (bien des préjugés venus de loin, bien des valeurs élitistes – négligeables ? normales ? acceptables ? détestables ? mémorables ? – sont en jeu dans le vol et la chute du « prince des nuées ») inscrits dans ce poème scolaire culte.
8 Elena Gianini Belotti, Du côté des petites filles (1973), éd. des Femmes, 2005, p. 128.
9 Cf. Y. Ansel, « Pour une socio-politique de la réception », Littérature, n° 157, mars 2010, p. 89-101 (article en ligne).
10 Exception à la règle, le sujet de composition française (CAPES lettres, 2016), portant sur une citation extraite des Testaments trahis de Milan Kundera : « Suspendre le jugement moral ce n’est pas l’immoralité du roman, c’est sa morale. La morale qui s’oppose à l’indéracinable pratique humaine de juger tout de suite, sans cesse, et tout le monde, de juger avant et sans comprendre. Cette fervente disponibilité à juger est, du point de vue de la sagesse du roman, la plus détestable bêtise, le plus pernicieux mal. Non que le romancier conteste, dans l’absolu, la légitimité du jugement moral, mais il le renvoie au-delà du roman. Là, si cela vous chante, accusez Panurge pour sa lâcheté, accusez Emma Bovary, accusez Rastignac, c’est votre affaire ; le romancier n’y peut rien. » Si l’apparition d’un tel sujet est symptomatique, s’il prouve à tout le moins que « la question des valeurs » a désormais sa place dans l’enseignement, il est toutefois notable que la citation choisie… va dans le sens même de ce qui s’enseigne : l’œuvre d’art suspend(rait) le jugement, met(trait) la morale commune entre parenthèses !
11 G. Plissoneau et A. Vibert, « La littérature d'idées appartient-elle à la culture commune ? », in Enseigner les « classiques » aujourd'hui, Peter Lang, Bruxelles, 2012, p. 96-97.
12 Le lecteur trouvera arguments, exemples et analyses dans De l’enseignement de la littérature en crise, op. cit., L’Harmattan, 2018, p.218-331.
13 Claude Lévi-Strauss, Tristes tropiques, Plon, 1955, p. 55.
14 Voir à ce propos l’article en ligne de Fl. Boulerie, « Le Traité sur la tolérance ou l’actualisation impossible », dans Recherches & Travaux, n° 91, Grenoble, 2017 [URL : http://recherchestravaux.revues.org/940]. Où il apparaît que les étudiants ne sont pas du tout armés pour comprendre, apprécier des textes à idées (fût-ce le Traité sur la tolérance de Voltaire, best-seller en 2015) parce que le système scolaire ne les prépare en rien à lire ce type d’œuvres. Et l’auteure de conclure qu’il ne faudrait pas moins d’une « révolution culturelle » pour que la « littérature argumentative » soit enfin prise en compte, cesse d’être ainsi négligée, dévalorisée, dans l’enseignement littéraire. No comment.
Pour citer ce document
Quelques mots à propos de : Yves Ansel
Université de Nantes – L’Amo EA 4276
Professeur émérite à l’Université de Nantes
Docteur ès lettres, spécialiste du romantisme et de Stendhal (Stendhal, le temps et l’Histoire, P. U. du Mirail, Toulouse, 2000 ; Stendhal littéral. Le Rouge et le Noir, Kimé, 2001 ; Pour un autre Stendhal, Garnier, 2012), Yves Ansel a co-dirigé le Dictionnaire de Stendhal (Champion, 2003), ainsi que les Œuvres romanesques complètes (3 vol. ) de Stendhal dans la Bibliothèque de la Pléiade (Gallimard, 2005, 2007, 2014). En 2012, il a publié Albert Camus totem et tabou. Politique de la postérité (P.U. de Rennes).
Dernière publication : De l’enseignement de la littérature en crise. Lire et dé-lires, L’Harmattan, 2018.