La Réserve : Archives I. Krzywkowski, HDR, vol. 1. Du jardin à l'espace littéraire

Isabelle Krzywkowski

Contes du jardin bosquien

Initialement paru dans : Henri Bosco. Rêver l’enfance, Christian Morzewski (dir.), Cahiers Robinson (Université d’Artois), n° 4, 1998, p. 221-235

Texte intégral

1Le fait que Bosco soit considéré comme un romancier de la nature n’infère en rien qu’il soit aussi un romancier des jardins. Car – si c’est une La Palissade, on peut pourtant le rappeler –, le jardin n’a rien à voir avec la nature, et les deux termes qui suffisent à le définir (la clôture et l’artifice) suffisent aussi à se convaincre que le jardin en est même l’antithèse. L’une des conséquences de ce constat est que l’on ne saurait traiter le jardin dans les mêmes termes qu’elle, ni lui accorder les mêmes fonctions dans un récit (d’un point de vue symbolique, comme d’un point de vue narratologique) : le jardin n’est pas un paysage, ce n’est pas un pan de nature et, dans une étude sur l’espace, il faudrait justement les opposer.

2C’est bien, me semble-t-il, selon ces deux termes, la nature et l’intervention humaine, que se bâtit justement la lecture de Bosco et l’utilisation qu’il fait du motif : c’est autour d’eux que s’élabore la « double rêverie » autour du jardin, espace à l’écart, produit d’un travail, lieu de lutte contre la nature dont il faut se protéger ; mais aussi lieu d’accession, par la compréhension de la nature, à un pouvoir justement surnaturel.

  • 1 Abréviations : L’Âne-Culotte : A.C. ; Hyacinthe : H. ; Le Jardin d’Hyacinth...

3Je m’appuierai essentiellement sur Antonin et sur l’ensemble constitué de L’Âne-Culotte, Hyacinthe et Le Jardin d’Hyacinthe1 (qu’on m’autorisera de nommer, pour gagner du temps la « Trilogie », même si ce terme n’a pas grand sens dans une œuvre où les personnages et les lieux ne cessent de se croiser et de se faire écho) : ces quatre récits me semblent en effet composer, comme je me propose de le montrer, des « récits exemplaires » du jardin, c’est-à-dire des récits tirant parti à la fois des contraintes liées à cet espace et de la tradition dans laquelle il s’inscrit : la présence de plusieurs jardins, en dessinant une géographie signifiante, contribue à structurer un récit à la fois merveilleux et mythique, qui s’appuie sur un topos que le texte, en fait, détourne subtilement et qui constitue pour certains personnages, et tout particulièrement les enfants, les étapes d’un cheminement proprement initiatique.

« Cette nature étrange de jardin séparé du monde » : le jardin dans l’espace romanesque

  • 2 Voir en annexe une liste des principaux jardins concernés.

  • 3 Dont le nom s’orthographie étrangement en -y- dans L’Âne-Culotte, et en -i-...

4Que les jardins tiennent, dans ce corpus du moins, une place centrale est confirmé par la variété des occurrences. On peut en proposer une typologie (également applicable aux textes où le motif est moins développé), fondée sur la personnalité des personnages qui les habitent. On peut ainsi les répartir en trois ensembles2 : les jardins « quotidiens », d’une part, inscrits dans le monde, ceux dans lesquels on jardine, ceux où l’on va prendre le frais, jardins utilitaires pour la plupart, comme le potager de Bénichat, de Mélanie ou celui de Maître Jacques dans L’Habitant de Sivergues, comme le verger de la Saturnine ou celui du Liguset ; et parfois jardins d’agrément, comme celui de M. Maillet (mais aussi, par exemple, des Métidieu et des Dérivat dans Le Mas Théotime). Il y a, d’autre part, ceux que j’appellerais les « jardins de l’enfance », c’est-à-dire les espaces que, dans les faits ou en rêve, les enfants ont investi : le coin de Geneviève Métidieu dans le jardin de Sancergues, la moitié nord du jardin de la Saturnine, entre le cyprès Pantaleon et le mur, ou, bien sûr, le jardin de Monsieur Maillet qui alimente l’extraordinaire rêverie d’Antonin et de Marie. Enfin, il y a ce que j’ai envie de nommer « l’autre jardin », les « grands » jardins de Belles-Tuiles, de Silvacane3, d’Almuradiel aussi, jardins aux étranges pouvoirs, auxquels on n’accède qu’avec difficulté – auxquels, d’ailleurs, tout le monde ne peut ou ne veut pas accéder. Au cœur de ce réseau, et procédant un peu de chacun, il y a les Borisols, petit jardin gagné sur la montagne, la nature, à la fois jardin utilitaire et jardin d’agrément : synthèse du jardin bosquien ? – on pourra se le demander.

  • 4 D’où l’événement que constitue, dans L’Âne-Culotte, les visites de grand-pè...

5Or cette répartition joue un rôle dans la composition d’ensemble des récits, puisque les deux premiers « types » partagent en général un même territoire : seuls le regard et la fonction changent, selon que le jardin est occupé par les adultes ou offert au gré des enfants, selon qu’on l’utilise ou qu’on s’y abandonne à l’attente, à la contemplation, à la rêverie. L’espace traduit néanmoins ce double usage, puisque ces jardins sont souvent divisés, opposant en une topographie rigoureuse un territoire adulte et familial, voire convivial, à un territoire strictement enfantin : le cyprès Pantaleon, par exemple, a pour fonction de marquer la séparation4. Les domaines enfantins sont eux-mêmes souvent précisément répartis : de même que sont séparés les jardins de Geneviève Métidieu et de Pascal Dérivat, d’Antonin et de Marie, « le côté du verger », qui appartient à Constantin, s’oppose au « côté de Noir-Asile », qui est à Hyacinthe – côté de l’ordre et côté du désordre, côté de l’attente et côté du rêve. On peut en outre remarquer que ces deux mondes, l’un féminin, l’autre masculin, communiquent presque exclusivement par le biais d’un regard, celui du garçon sur la fille.

6Entre ces deux premiers « types » et le troisième, il y a au contraire solution de continuité, suivant qu’ils sont autorisés ou interdits, familiers ou étrangers : le jardin de Peyrouré s’oppose à Belles-Tuiles, le verger de la Commanderie et le potager de Mélanie à Silvacane, les Borisols et le verger du Liguset au Domaine des Mages (Sylvacane) et le potager de Bénichat au jardin mystérieux qui se trouve de l’autre côté de l’impasse. Ainsi se constitue un système binaire qui articule d’un côté le jardin familial, utilitaire, social, inscrit dans une communauté, mais qui détient aussi, pour qui sait le voir (essentiellement les enfiants), les promesses d’un autre monde ; et le jardin solitaire, tentateur, jardin magique ou jardin d’agrément, où l’enfant fait l’expérience des sens.

7Parce qu’il présente une typologie cohérente, le jardin apparaît comme un élément important de la composition du texte. Nous verrons plus loin qu’on peut mettre en évidence une série de scènes dont la récurrence confirme l’idée que ces cinq histoires composent en effet des « contes du jardin » : le récit fait passer d’un jardin à l’autre et l’un de ses enjeux est l’accession à l’espace interdit que constitue « l’autre » jardin. Bien plus, les textes inscrivent clairement le jardin à l’incipit et à l’excipit du récit, confirmant que cet espace assume la double fonction de cadre de l’intrigue et de cadre de la narration, lieu sur lequel et, en quelque sorte, à l’intérieur duquel on écrit. En ce sens, on peut donc considérer que ce cheminement et ces passages dessinent les étapes du parcours narratif, contribuant à la structuration des personnages comme à celle du récit.

  • 5 C’est le cas, par exemple, du verger où se réfugie Antonin lors de sa premi...

8Tous ces lieux ont, qui plus est, un point commun qui tient à leur nature commune de « jardin » : ce sont des lieux à part. Ils nous découvrent ainsi une autre géographie pertinente du texte, qui a cette fois pour fonction de caractériser les personnages. À l’écart, d’abord, des hommes et du village, ou dans une « zone », le jardin témoigne de la singularité de son propriétaire : les mas sont toujours éloignés des villages, les jardins de Cyprien sont complètement isolés et même le jardin de Bénichat est un bout du monde, entre une impasse et une gare de triage... Le jardin se donne clairement comme le lieu de la marge, voire de l’asocialité : toutes les figures qui l’habitent ont quelque chose de différent, et le jardin contribue à la fois à protéger et à exhiber cette singularité. Celui-ci est, d’autre part, à l’écart de la nature. S’il est impossible d’étudier en détail les rapports très ambigus que le jardin entretient à la nature, du moins peut-on constater que Bosco a recours à cette opposition selon deux régimes différents : d’un côté, les jardins de Cyprien, qui se protègent âprement, par des ravins, des montagnes, de l’intrusion d’une nature avec laquelle ils entretiennent un rapport d’antagonisme ; c’est là d’ailleurs sans doute l’une des fonctions des jardins de Cyprien, comme en témoigne le conflit cosmique, ou plutôt tellurique, du serpent et du renard dans L’Âne-Culotte. D’autres fois, au contraire, le jardin semble fonctionner de manière plus harmonieuse, comme l’annonciateur des forces naturelles : ce sont alors souvent des vergers, presque toujours des espaces à l’abandon ou inhabités5, qui servent de cadre à la révélation d’un mystère et d’un pouvoir de la nature.

9Ainsi, le jardin constitue-t-il des « pôles » dans le texte, où s’articulent les rapports de la famille à la communauté, de l’individu à la famille, de la culture à la nature, mais aussi de l’homme au mythe. Signe de singularité, en somme, et à mettre comme tel du côté des demeures dans la topologie de l’œuvre bosquienne ; mais participant plus que ces dernières – même lorsqu’elles sont appuyées au rocher ou traversées de souterrains – au rapport mystérieux de l’homme et de la nature. Le jardin est, par essence, dans cette ambivalence, et Bosco en joue avec mæstria.

« Entre la nature et moi l’amitié s’était faite » : présence et détournement du mythe paradisiaque

  • 6 Sur cette question, voir Michel Sufran, « Le Thème du paradis perdu », in :...

10Ceci se manifeste particulièrement avec la récurrence des évocations du mythe édénique, que les textes semblent inlassablement interroger : sans parler des innombrables occurrences du terme « paradis », et moins encore des images qui lui sont liées6, l’œuvre assigne au thème une fonction de clôture du récit. Cette valeur à la fois symbolique et fondatrice est confirmée par la variété des réalisations, qui témoigne que l’on peut également lire ces textes comme une réflexion sur le motif édénique et ses ambiguïtés.

Le Paradis selon l’abbé Chichambre

  • 7 Le Paradis est évoqué p. 13-14 et 178, dernière page du récit de Constantin.

11Encadrant le récit de Constantin Gloriot7, – et plaçant ainsi le texte de L’Âne-Culotte, et par là-même toute la « Trilogie », sous ce signe – le Paradis de l’abbé Chichambre est un « paradis pour petite paroisse », « un joli paradis humain » (A.C., p. 13). Il est tellement humain qu’il ressemble à un village plutôt qu’à un jardin, mais les enfants le préfèrent aux paradis stéréotypés, avec leurs anges musiciens, qu’on évoque aux veillées de famille.

12À cette vision apaisante, rassurante, et pourtant apparemment excitante pour l’enfance fait écho le curieux et menaçant proverbe de la Péguinotte : « Celui qui vit loin du pays, / N’entrera pas au Paradis !.. » (A.C., p. 39) – on voit que, selon la sagesse populaire, la faute pèse dès l’origine sur Cyprien. Pour autant, la première fois que Constantin verra Belles-Tuiles, il y trouvera exactement la description de l’abbé Chichambre : « un paradis modeste au milieu d’un hectare d’arbres fruitiers ; un paradis blotti au pied d’une haute falaise, [...] un paradis sur lequel veillait un vieux saint » (A.C., p. 14). On conçoit que, outre le mystère propre au jardin, un telle coïncidence (mais en est-ce une ? L’abbé Chichambre serait-il l’un des tentateurs ?) ait de quoi fasciner le jeune garçon...

Les ambiguïtés de Fleuriade et de Silvacane

13Cyprien, quant à lui, ne s’est jamais caché de vouloir reconstituer le Paradis sur terre, ou plutôt de vouloir éveiller de « sous terre, le vieux Jardin d’Adam, englouti après le péché, intact » (A.C., p. 206), pour « sauver [la vie] des ténèbres futures. Communiquer l’amour » (J.H., p. 254). Mais c’est un curieux paradis, et ce pas seulement parce qu’on y vole les âmes (ce qui est, somme toute, presque normal !). Certes, le jardin de Belles-Tuiles, lieu d’« alliance », comme le dira le journal de Cyprien, « avec toutes les fleurs [...] et toutes les bêtes apprivoisées » (A.C., p. 192 et 138), se présente bien d’abord, dans la tradition du topos, comme un microcosme. C’est, selon la même tradition, un lieu où l’on maîtrise le temps : non qu’il en soit absent (on trouve d’ailleurs un cadran solaire à Fleuriade), mais on sait que Cyprien devance les saisons (« J’ai créé des sèves précoces qui faisaient fleurir les vergers hors de saison », J.H., p. 255). Nul doute qu’il ne cherche aussi à vaincre la fatalité de la mort : son combat avec le renard en fait foi, et peut-être plus encore le caractère obsessionnel de son désir de transmission.

  • 8 Il est vrai que l’arbre défendu n’est peut-être pas là où on le croit : « P...

14On note cependant de nombreuses divergences d’avec le mythe édénique. Par exemple, s’il est défendu à celui qui ne connaît pas les règles de toucher aux arbres de Fleuriade, l’arbre interdit est absent du jardin : Cyprien, au risque de s’attirer la méfiance de tout le village, s’arroge le droit de couper les amandiers avant terme, et Mélanie dira de même de Silvacane : « Il y a aussi un serpent [...] comme au Paradis, mais pas un arbre défendu » (H., p. 196). Est-ce à dire qu’il n’y a plus de transgression possible à Silvacane8 ? Et ne serait-ce pas là le but recherché par Cyprien : libérer l’homme du poids de la faute et lui rendre le divin (J.H., p. 254) ?

  • 9 Sur cette question, voir Charles du Ry, « Henri Bosco et les mythes », in :...

15Par ailleurs, on trouve à Fleuriade non pas un, mais des serpents, dont aucun n’est pourtant venimeux ; le seul danger pourrait venir du « monstre », mais on le sait « épris » de Cyprien, séduit par sa musique. De fait, loin de pousser au mal, le grand serpent est « gardien des arbres » (A.C., p. 88) et défend le jardin contre le renard, son ennemi, qui s’en prend à la vie. Faut-il considérer que l’une des fautes de Cyprien aurait été de croire qu’on peut impunément héberger un serpent ? Ou faut-il voir en ce dernier la réminiscence du serpent tellurique et primordial, témoignage du travail syncrétique auquel Bosco se livre sur les mythes9 ?

16Fleuriade est-il un Paradis ? L’abbé Chichambre lui-même y ressent une impression de « béatitude ». D’ailleurs, il ne fait nul doute qu’il s’agit, pour Cyprien, d’un recommencement : le nouveau calendrier en témoigne. Si le jardin est lié à l’enfance, c’est ici à une enfance du monde et de l’humanité (le passage du nom de « Belles-Tuiles » à celui de « Fleuriade » en est sans doute emblématique) : c’est le « paradis de l’homme » (H., p. 234) que Cyprien cherche à créer, et il semble persuadé d’y être parvenu.

17Mais ce désir n’en paraît pas moins constituer une sacrilège volonté de « refaire la création », et la non moins sacrilège tentative de donner vie à un mythe : il s’agit, en quelque sorte, de réaliser par le jardin, lui-même produit de l’industrie humaine, un mythe humain. Est-ce pour autant possible de recréer un Paradis ? La tentative de Cyprien semble se solder par un échec... On peut ainsi s’interroger sur la nature de la faute de Cyprien, l’homme qui coupe les amandiers avant l’heure et pactise avec le serpent sans voir à mal. Le texte fournit bien quelques clés : l’orgueil, le manque d’amour, l’oubli de Dieu. Mais la vraie faute, et ce qui fait pourtant que Cyprien ne sera jamais tout à fait coupable, ne consiste-t-elle pas plutôt dans le fait d’avoir voulu, comme le pathétique héros d’Une Histoire immortelle d’Orson Welles, donner forme à la légende, pour offrir le mythe à l’homme ? Car ce qui est en jeu, dans le jardin, c’est moins le sacré que le mythe – c’est-à-dire, somme toute, l’écriture...

Les Borisols

18Le jardin des Borisols, sur lequel s’achève la « Trilogie », est, quant à lui, comme l’explique Méjemirande, « un lieu où l’esprit souffle, un emplacement pour les âmes, un site orienté » (J.H., p. 224) ; c’est une étrange puissance qu’il partage avec l’Almuradiel d’Antonin. Les gens qui vivent aux Borisols sont paisibles, leur jardin est à taille humaine ; ils sont fidèles au passé, à la nature, à la montagne. Ce jardin peut donc sembler, par cette harmonie qu’il insuffle entre l’homme et la nature, le lieu où s’équilibrent les tensions à l’œuvre dans les textes bosquiens : il allie christianisme et paganisme, nature et présence humaine, réserve et enjouement, solitude et sociabilité (il est d’ailleurs choisi par Cyprien, sans que l’on sache pourquoi, pour accueillir Hyacinthe). Il est comme hors du temps, mais fidèle au passé, attentif aux saisons et aux heures, comme en témoigne le cadran solaire. Il est, d’ailleurs, le seul des jardins à être explicitement donné pour un Paradis : « Pardes », lit-on sur la pointe Est du cadran.

  • 10 On peut noter que, par l’emblème du serpent et de l’étoile, ces jardins so...

19Cet objet me semble du reste un élément déterminant, car il tisse, avec la source, un réseau signifiant d’un jardin à l’autre : le jardin du Jas de Hugue, comme Fleuriade, sont également ornés de cet objet-signe dont Le Jardin d’Hyacinthe nous donne donc peut-être la clé10. Faut-il alors y voir, comme le texte semble le suggérer, et bien que le cadran solaire marque une temporalité, les véritables Paradis ? Pourtant Fleuriade, qui leur ressemble, n’est-il pas le lieu de toutes les fautes ? Et tous n’ont-ils pas en commun d’être à l’écart de la société humaine ? D’où vient, d’ailleurs, que Guériton soit (avec le renard) le seul mort de la « Trilogie » et que la source des Borisols se tarisse progressivement, presque cruellement ? Il n’y a pas, ici, comme dans Le Trestoulas, de démiurge pour maîtriser les eaux ; faut-il penser qu’il y en a un pour les faire revenir : l’amandier fleuri n’est-il pas le signe de Cyprien ? Mais les Borisols, sauvés par Cyprien, sont-ils encore un paradis ? Le texte, on le voit, n’offre pas de réponses à la question que, me semble-t-il, il sous-tend : est-il légitime de vouloir retrouver le Paradis ?

  • 11 Cyprien, qui constate que le narrateur de Hyacinthe n’a pas voulu rester à...

20De fait, l’attitude des personnages est troublante : Frédéric Méjan, même s’il devine le sens du lieu (« Mais c’est le paradis ! » s’écrie-t-il, J.H., p. 48), ne comprend pas l’inscription du cadran solaire ; le narrateur de Hyacinthe ne sera pas capable de s’arrêter au Jas de Hugue, dont la description ressemble beaucoup à celle des Borisols, ni, du reste, dans le second Fleuriade, auquel il n’accédera d’ailleurs même pas11 : faut-il comprendre que ceux-ci n’étaient pas, ou pas complètement, des « élus » ? Mais, à l’inverse, Constantin et Hyacinthe n’osent plus entrer à Silvacane... Quant à Cyprien, il semble bien qu’il ait échoué avec les deux Fleuriade, comme il a échoué à faire jaillir le jardin après l’enlèvement d’Hyacinthe. L’homme n’est-il pas en état de créer un Paradis ? N’est-il plus en état de le voir ? Ou a-t-il finalement choisi de ne plus le chercher ? S’agit-il de se contenter d’un « paradis de petite paroisse » ou faut-il au contraire réapprendre à voir, comme Antonin à Almuradiel ?

« Je savais qu’il ne fallait pas franchir la haie » : apprentissage de la vision

21À l’origine du regard que l’enfance porte sur le jardin, on trouve, à n’en pas douter, ce motif du Paradis : Marie commence à rêver le jardin de Monsieur Maillet en réécrivant la Genèse (ce qui la rapproche d’Ève autant que de Cyprien) et sa première remarque place d’emblée le jardin dans l’ordre de la tentation et de la transgression :

La dame a mangé une pomme, puis elle a appelé un monsieur et elle lui a dit : Mange avec moi la pomme. Le monsieur est venu tout de suite. J’ai entendu ses pieds dans le gravier. Ils ont un beau jardin avec des allées droites et, dans les allées, du gravier tout rose. C’est comme ça. (A., p. 168)

22Motif de la pomme, thème du lieu mystérieux dont l’interdit se matérialise par un mur, présence de voix angéliques : nul doute que le souvenir de l’Éden n’induise la rêverie enfantine, comme c’était aussi le cas dans L’Âne-Culotte.

  • 12 C’est le cas du jardin de Monsieur Maillet dans Antonin ou de Belles-Tuiles.

  • 13 Michel Sufran, art. cit., p. 96.

23Il semble, en effet, que l’un des enjeux de ces textes consiste à rendre compte de l’accession des enfants à ces jardins « paradisiaques ». La conquête du jardin par l’enfant diffère, selon qu’il y a librement accès ou qu’il se trouve à l’extérieur. Des buissons protègent son espace du regard des adultes. Mais lui-même est exclu par un mur des jardins interdits, d’autant plus tentateurs qu’il y a toujours une ouverture, des effluves, des sons12 pour les pressentir. Or l’enfance aime à transgresser les interdits : c’est donc d’abord parce qu’il est clos que le jardin rend possible la rêverie. De fait, comme le remarque Michel Sufran, « le mur longuement décrit dans Antonin ne clôt pas un univers, il en est l’accès »13.

24On comprend alors pourquoi le jardin fascine tant l’enfance, pourquoi il apparaît comme l’un de ses lieux privilégiés, comme ne cesse de le rappeler la « Trilogie ». Il correspond précisément à tout ce que Bosco met au compte de l’enfance. C’est d’abord un refuge qui satisfait son goût de la solitude, de l’attente, du secret :

C’était (je le comprenais maintenant) l’un des plus graves habitats de mon enfance. J’y avais trouvé un refuge. L’enfance cache le souci, le goût des lieux secrets. Elle a besoin, pour célébrer ses petits cultes et pour essayer ses magies, de retraites mêmes fictives. Dès qu’elle se sent séparée, qu’elle se trouve à l’abri des regards, le monde entier se plie à ses naïfs sortilèges. Ceux qui me revenaient de Noir-Asile m’étonnaient par leur violence. (H., p. 86)

25Le jardin répond ainsi au goût de l’enfance pour le merveilleux, les « miracles », le « surnaturel » (A., p. 29) – goût du mystère, d’ailleurs, plus que du surnaturel, à la différence des adultes : Belles-Tuiles qui surgit « merveilleusement de la terre infertile », « vrai jardin magique » (A.C., p. 139 et 224) fait écho au « domaine enchanté » de Silvacane (J.H., p. 171) ; Noir-Asile, les Borisols sont une « aire magnétique », « orienté[e] » (A.C., p. 147 et J.H., p. 224). Le jardin tout entier est habité de ces « présences secrètes » que guettent Antonin et Constantin (A.C., p. 167). Et l’intérêt du jardin est justement de leur permettre de développer leurs propres rêveries, à l’abri du monde adulte.

26Le jardin se présente donc comme un lieu de visions : visions suscitées par les discussions de Marie et d’Antonin ou de Constantin et d’Hyacinthe ; vision de Marie dans le verger, visions de Constantin à Belles-Tuiles, où il découvre comme une quintessence du Paradis promis par l’abbé Chichambre. À chaque fois, l’attirance est doublement motivée par l’interdit tentateur et les forces surnaturelles que l’on pressent à l’œuvre dans le jardin, la certitude d’avoir accès à un lieu à part, supérieur, magique, un lieu qui ouvre sur des forces inconnues.

27Par ce biais, le jardin assure à n’en pas douter une fonction initiatique dans le récit : il représente toujours le lieu d’une aventure, parfois d’une rupture, un lieu d’épreuves où l’enfant se trouve confronté à la tentation (du savoir, des sens, de l’interdit), mais où il doit aussi apprendre à préserver sa liberté. Car le jardin peut devenir le lieu du pouvoir sur les âmes, parfois une prison.

  • 14 On trouvera en annexe 2 l’analyse des différentes étapes du parcours.

28Mais il est surtout l’un des lieux, comme la montagne ou la rivière, à partir duquel l’enfant élabore ses rêves. On peut ainsi, par exemple, proposer de lire Antonin comme l’apprentissage progressif14, par l’intermédiaire du jardin, du pouvoir du rêve sur le réel. Dans L’Âne-Culotte, l’objet de l’initiation est sans doute sensiblement différent, mais l’évolution des deux enfants dépend de même du passage d’un jardin à l’autre : c’est de leur opposition que naît la tension du récit, et les péripéties conduisent les deux jeunes gens à la reconnaissance.

29L’initiation reste cependant ambiguë, et l’on ne saura jamais, chez Bosco, s’il fallait ou non franchir le mur : face au verger lunaire, Antonin sent qu’il ne faut pas entrer : est-ce sagesse ou, comme Perceval, naïveté ? Antonin ne saurait-il pas encore accéder au mystère du jardin, qu’il découvrira à la fin du texte dans Almuradiel, ce lieu qu’il a peut-être rêvé, mais qu’il pourra retrouver à son gré par le rêve et l’écriture, par le texte que nous sommes en train de lire et par tous les avatars d’Almuradiel que l’œuvre nous donne à voir ? Ou au contraire va-t-il, ayant découvert la sensualité dans le jardin de Monsieur Maillet, commettre une faute en accédant à Almuradiel, y perdant son âme, tout comme Hyacinthe, puisque là, justement, s’achève le texte ? De même, Constantin et Hyacinthe semblent finalement rejeter Silvacane, comme s’ils avaient enfin compris la leçon : on ne transgresse pas deux fois le mur du jardin... Mais ont-ils raison de ne plus l’oser ? N’y perdront-ils pas là aussi leur âme ?

  • 15 André Hardellet, Le Seuil du Jardin, Paris, Julliard, 1958.

30Il reste que le jardin est, à proprement parler, un « seuil », pour reprendre le beau titre de Hardellet, qui en fait lui aussi le haut lieu du songe de l’enfance15. Parce qu’il est à l’écart, il est un lieu de passage, un lieu intermédiaire, – c’est-à-dire en fait, chez Bosco, un lieu de fusion : précisément le lieu où réel et imaginaire interfèrent. Antonin s’émerveille, devant le verger lunaire, de ce que « le réel, dans cet étrange paysage, [lui] devenait imaginaire et l’irréel concret » (A., p. 150) ; expérience qu’il retrouve en voyant Marie dans le verger désert comme « un être réel » ; expérience qu’il refera peut-être à l’excipit – car qui nous dit qu’Almuradiel, avec son nom d’ange, est réel ? Lieu à l’existence improbable, dans lequel Antonin entre sans le savoir, Almuradiel est d’abord un nom – et ce nom, nul n’avait dit qu’il désignait un jardin... C’est, bien plutôt, le cadre des visions d’Antonin, l’aboutissement des vergers contemplés, ce jardin des rêves dans lequel le héros de Hardellet parviendra lui aussi enfin à entrer grâce à une machine. Ainsi, le sujet fondateur d’Antonin pourrait-il être celui du cheminement initiatique vers Almuradiel et vers l’écriture. En ce sens, le récit serait bien achevé : Antonin est arrivé au bout de son périple.

31La fonction du jardin est dès lors transparente : il est le lieu même de l’affrontement entre le naturel et l’artificiel, lieu du pouvoir de l’homme sur la nature et par là, lieu du pouvoir de l’homme sur le réel, force de transmutation, voire de transsubstantiation. Ainsi le jardin est-il l’un des lieux où l’enfant fait l’apprentissage du pouvoir de son regard sur le réel : il peut le transformer, atteindre par lui à un autre degré de réalité et, par là-même, bien que les textes ne le disent pas explicitement, atteindre à l’écriture, tout comme Cyprien y a accédé par l’intermédiaire de Fleuriade. En ce sens, le jardin est bien le lieu du merveilleux, mais c’est surtout celui même de la fiction.

32Ainsi, en dessinant un parcours initiatique de jardin en jardin, en utilisant le topos enrichi par le syncrétisme (car le jardin est, par essence, un lieu de synthèse), ces textes se présentent comme des « contes du jardin » : ils utilisent les éléments caractéristiques de cet espace, à la fois sa fonction constitutive, qui contribue à structurer l’espace romanesque et la narration, et sa valeur symbolique, liée au motif de la création.

33Pourtant, si le vrai Paradis n’est pas définitivement perdu, il n’est peut-être pas dans les « vergers illusoires » que veulent habiter les humains : Fleuriade, c’est d’abord le journal de Cyprien ; la magie de Fleuriade, c’est d’abord la multiplication des récits qui le décrivent ; la magie d’Almuradiel, c’est d’abord son nom d’ange. Et c’est parce qu’il permet d’atteindre à cet « autre regard » où la frontière entre réel et imaginaire s’estompe, que le jardin se donne pour lieu vrai du Verbe et de la création.

Notes

1 Abréviations : L’Âne-Culotte : A.C. ; Hyacinthe : H. ; Le Jardin d’Hyacinthe : J.H. ; Antonin : A.

2 Voir en annexe une liste des principaux jardins concernés.

3 Dont le nom s’orthographie étrangement en -y- dans L’Âne-Culotte, et en -i- dans Hyacinthe.

4 D’où l’événement que constitue, dans L’Âne-Culotte, les visites de grand-père Saturnin, et peut-être une certaine inconscience de sa part (ou faut-il y voir un acte de volonté ?) lorsqu’il pense dissimuler l’âne dans Noir-Asile déserté par Hyacinthe. Notons aussi qu’à l’intérieur de ces jardins, on trouve parfois un lieu plus secret encore, la cabane de Bénichat ou celle de Noir-Asile. Leur font écho les pavillons auxquels s’adossent les rêveries de Frédéric Méjan ou du narrateur de Hyacinthe.

5 C’est le cas, par exemple, du verger où se réfugie Antonin lors de sa première fugue et de celui où il croit voir Marie, près du Mas-du-Gage.

6 Sur cette question, voir Michel Sufran, « Le Thème du paradis perdu », in : Le Réel et l’imaginaire dans l’œuvre de Henri Bosco, Paris, José Corti, 1976, p. 93-115.

7 Le Paradis est évoqué p. 13-14 et 178, dernière page du récit de Constantin.

8 Il est vrai que l’arbre défendu n’est peut-être pas là où on le croit : « Petit qui se tourne les pouces, c’est l’arbre du démon qui pousse » dira la Péguinotte (A.C., p. 83), s’opposant en cela aux propos de l’abbé Chichambre : « N’était-ce pas, lui, (l’enfant), le vrai Paradis? » (A.C., p. 222).

9 Sur cette question, voir Charles du Ry, « Henri Bosco et les mythes », in : Henri Bosco : Mystère et spiritualité, Actes du iiie colloque international, Nice, 22-24 mai 1986, Paris, Corti, 1987.

10 On peut noter que, par l’emblème du serpent et de l’étoile, ces jardins sont aussi liés au Domaine des Mages.

11 Cyprien, qui constate que le narrateur de Hyacinthe n’a pas voulu rester à Silvacane, avoue par ailleurs avoir « souhaité [sa] misère » (H., p. 237) ; il semble qu’il ait agi de même avec Frédéric Méjan.

12 C’est le cas du jardin de Monsieur Maillet dans Antonin ou de Belles-Tuiles.

13 Michel Sufran, art. cit., p. 96.

14 On trouvera en annexe 2 l’analyse des différentes étapes du parcours.

15 André Hardellet, Le Seuil du Jardin, Paris, Julliard, 1958.

16 La toute première mention du jardin (p. 17) évoque celui du Mas du Gage (qui ne sera plus jamais, d’ailleurs, dénommé ainsi : seule « l’aire » sera par la suite mentionnée, ainsi que le potager du père) et rappelle qu’avec la présence de Tante Clarisse, « le jardin s’emplit de mystère ».

Annexes

Annexe 1 : Liste des principaux jardins

L’Âne-Culotte (1937)

- Belles-Tuiles (ou Fleuriade, premier jardin de Cyprien).

- Jardin de La Saturnine (jardin de la maison des grands-parents de Constantin Gloriot à Peïrouré).

- Diverses évocations du Paradis, en particulier celle de l’abbé Chichambre, à l’incipit.

- Autres : jardins du village ; jardin des cousins Jorrier.

Hyacinthe (1940)

- Le verger de la Commanderie.

- Silvacane (deuxième jardin de Cyprien, qui contient le « second Fleuriade »).

- Le verger de Peïrouré, Belles-Tuiles (dans le « rêve de souvenirs » du narrateur, qui reprend les termes de la description de L’Âne-Culotte).

- Autres : potager de la Commanderie ; potager de Mélanie Duterroy ; jardin de l’auberge du Jas de Hugue.

Le Jardin d’Hyacinthe (1945 / 46)

- Le jardin des Borisols (habité par Guériton et la Guéritonne).

- L’Arbustine, le verger du Liguset (Frédéric Méjan).

- Le verger de Peïrouré, Belles-Tuiles (dans le « rêve de souvenirs » de F. Méjan et dans le récit de Méjemirande).

- Autres : les jardins des Amélières et le jardin du presbytère ; le domaine « Les Mages » (sans doute Silvacane, si l’on suit Méjemirande) ; le jardin « raté » de Cyprien (journal).

Antonin (1952)

- Le verger qui sert de refuge à Antonin lors de sa première fugue (préfigure Almuradiel).

- Le potager d’Aristide Bénichat.

- Le jardin de Monsieur Maillet (rêvé, puis habité).

- Le verger « au-delà de l’aire ».

- Almuradiel.

- Autres : jardins de l’impasse ; jardin de Marie ; le quartier des jardins.


Annexe 2 : Étapes de la découverte des jardins dans Antonin

- La première expérience du jardin16 est celle du verger « lunaire » au bord duquel Antonin s’est réfugié pendant sa fugue : la vision qu’il en a ne lui est pas encore personnelle (elle est du registre du conte de fées, comme celle de Marie sera, plus tard, du registre mythique) et si elle fait naître une émotion, celle-ci est « une émotion inexplicable, qui m’inquiétait et aussi m’était douce » (p. 30).

- C’est avec le refuge dans la cabane de Bénichat, et surtout pendant les longues heures passées le long du mur et des jardins de l’impasse, qu’Antonin va progressivement prendre conscience de son propre pouvoir : il se met à créer des mondes et des histoires. Le rêve de jardin qu’il fait ensuite avec Marie, outre qu’il est le premier rêve partagé, est une étape supplémentaire de l’apprentissage : « Je n’inventais plus », dit-il, « je voyais. [...] Je ne feignais plus ; je croyais » (p. 169). C’est aussi la première fois qu’intervient l’idée de transgression : en cela, Marie assume parfaitement son rôle de petite Ève (association assez sacrilège, on en conviendra, du prénom et de la fonction !).

- La découverte du jardin de Monsieur Maillet marque une sorte de pause dans l’apprentissage, et peut-être une épreuve : c’est un état de « comble » (« [le mur] n’opposait plus un obstacle au désir, mais il le comblait ») et l’enfant n’éprouve « aucune déception » face au jardin réel (p. 284). Cependant, quelque chose (le secret annoncé par le verger lunaire ?) semble perdu : est-ce parce qu’il n’y a pas d’interdit, ni de transgression ? Est-ce parce qu’il y a une forme d’accomplissement ? Si le mur « avait changé de nature, de rôle, de destination », il « avait perdu ses vertus de pierre vieillie et déjà branlante », il « n’était plus que présence » (p. 309), devenu inaccessible, dévoré par l’exubérance des plantes (quel paradoxe : vouloir voir le mur de l’intérieur du jardin !). De fait, ce qui se réalise dans ce jardin, c’est le cadre réaliste du rêve, et non pas sa puissance onirique : Antonin (malgré la musique) se livre à l’apparence de la vie, oubliant qu’il peut la créer, et ainsi « inventer » son âme.

Ajoutons que c’est aussi, par la troublante Madame Maillet et la fascinante exubérance du mur, le lieu qui lui fait oublier (est-ce là la faute ?) d’attendre Marie.

- De retour au Mas du Gage, Antonin croit voir Marie dans un verger inhabité. L’épisode représente l’exact pendant de celui du « verger lunaire », à cette différence près que la femme y est entrée (Marie mangeant des abricots, vision d’une évidente sensualité). Non seulement l’image, au lieu d’être fournie par les contes, appartient cette fois en propre au jeune homme, mais elle est devenue « incontestable réalité » ; bien plus, Antonin parvient à présent à la maîtriser, en retenant son souffle, en se contenant, par un effort qui n’est pas sans rappeler l’expérience du narrateur de la Recherche.

- L’achèvement du parcours c’est, bien sûr, Almuradiel (la fille du cirque n’avait d’ailleurs pas dit qu’il s’agissait d’un jardin) : c’est, comme Silvacane, domaine des Mages, un bois sacré ; c’est, comme les Borisols, un lieu habité par une « singulière puissance ». C’est aussi le moment d’une transfiguration (p. 403) et de la plénitude (p. 405), lieu où il découvre son corps et où il parvient à la parfaite maîtrise d’une vision à présent vécue en toute certitude : « C’est Almuradiel. Et j’y ai dormi ! » (p. 408).

Pour citer ce document

Isabelle Krzywkowski, «Contes du jardin bosquien», La Réserve [En ligne], La Réserve, Archives I. Krzywkowski, HDR, vol. 1. Du jardin à l'espace littéraire, Poétique du lieu, mis à jour le : 16/11/2015, URL : http://ouvroir.ramure.net/revues/reserve/225-contes-du-jardin-bosquien.

Quelques mots à propos de :  Isabelle  Krzywkowski

Université Grenoble Alpes / U.M.R. Litt&Arts – ISA

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