La Réserve : Livraison du 09 janvier 2016

Daniel Lançon

Les études littéraires orientalistes d’hier à demain ou les Orients décomposés et recomposés

Inédit. Version écrite d’une conférence prononcée à l’École Doctorale de l’Université d’Alsace à Mulhouse, en juin 2013, dans le cadre d’une journée « Orients » de la formation Erasmus Mundus du doctorat européen.

Texte intégral



à la mémoire de Jacques Huré


1. Crise chez les savants (1960-1980)

1La situation contemporaine de l’orientalisme littéraire ne peut se comprendre sans revenir à la crise de la profession d’orientaliste savant au moment des luttes pour l’indépendance au Maghreb et au Proche-Orient. L’enfermement des savants orientalistes dans leurs austères études est alors fortement remis en cause par l’irruption des Orientaux comme sujets de leur histoire. Et c’est très précisément la question de la parole donnée à l’autre qui retient Jacques Berque lors d’un colloque de sociologie musulmane qui se tient à Bruxelles en septembre 1961 :

2Comme notre discipline s’est naturellement développée durant l’ère coloniale, elle encourt un discrédit supplémentaire. La tension en vient parfois au point que certains Orientaux récusent jusqu’au principe de notre connaissance, se refusent à toute intelligibilité qui viendrait du savant étranger. On entend parfois des paroles pénibles. Bien sûr, elles sont palliées par l’attitude inverse, dont nous bénéficions souvent, par bien des gestes de noble accueil, voire par une collaboration internationale qui déjà commence à associer les uns et les autres aux mêmes tâches.

  • 1 « Pour l’étude des sociétés orientales contemporaines », Bruxelles, Corresp...

  • 2 Actes, p. 458-459, cité dans Diogène, n° 44, octobre-décembre 1963, p. 137.

3Sur les vingt orateurs, pas un seul savant d’Orient, il s’en émeut : « Que nous soyons ici réunis à parler de sociétés orientales en l’absence de nos collègues orientaux, il y a là une anomalie […] qui doit être méditée. Car son interprétation nous entraîne, je pense, au-delà de la conjoncture politique, pour nous porter à une remise en cause des méthodes de notre discipline, et, peut-être, de son objet »1. Les conclusions du colloque sont claires, telles qu’énoncées dans les Actes : « La sociologie orientaliste doit viser à s’intégrer aux sociétés orientales, non pas par la connaissance, autrefois liée à l’expansion colonialiste, mais par la construction du dedans »2.

4Peu après, le sociologue égyptien Anouar Albdel-Malek publie une étude, à la fois très documentée et polémique, sous le titre : « L’orientalisme en crise », dans Diogène, la revue de l’Unesco. Le procès des orientalistes y est instruit en quatre points :

  • Les orientalistes sont restés « européocentriques. » Il rappelle le « procès de l’ignorance occidentale de l’Orient » « maintes fois dressé », « l’hégémonisme des minorités possédantes, mis à nu par Marx et Engels, et l’anthropocentrisme démantelé par Freud s’accompagnant de l’européanocentrisme en matière de sciences humaines et sociales, et plus particulièrement dans celles en rapport direct avec les peuples non européens. » Les orientalistes « considèrent l’Orient et les Orientaux comme « objet » d’étude, frappé d’altérité – comme tout ce qui est autre, qu’il soit « sujet » ou « objet » – mais d’une altérité constitutive, de caractère « essentialiste », et souscrivent à une « typologie ethniciste caractérisée ». Anouar Abdel-Malek déclare ouvertement que « l’essentiel du travail accompli au sein des universités et des sociétés savantes » est « profondément imprégné de postulats, d’habitudes méthodologiques et de concepts historico-philosophiques qui devaient compromettre, souvent, les résultats et la valeur scientifique de travaux ardus » à cause de liens avec des « hommes d’affaires », « militaires », « fonctionnaires coloniaux », « missionnaires », « publicistes » et « aventuriers »3.

  • « La crise frappe au cœur l’orientalisme : depuis 1945, ce n’est pas seulement le « terrain » qui lui échappe, mais aussi les « hommes », hier encore « objet » d’étude, et désormais, « sujets » souverains »4. Il reprend ici le constat de Jacques Berque.

  • Les orientalistes sont obsédés par un passé toujours étudié « dans ses aspects culturels – notamment la langue et la religion – détachés de l’évolution sociale. » Ils ne montrent pas assez d’intérêt pour l’histoire contemporaine5.

  • Les orientalistes n’accordent pas assez d’attention aux apports des nouvelles « sciences humaines et sociales » dans un monde de « renaissance des nations et des peuples d’Asie, d’Afrique et d’Amérique latine. » Anouar Abdel-Malek soutient une redéfinition des relations entre l’orientalisme et chacune des sciences humaines universalisantes (histoire, économie, sociologie, littérature, linguistique…)6 7.

5Le 29ème Congrès international des orientalistes, tenu à Paris pendant l’été 1973, – la première réunion s’était tenue dans la même capitale cent ans plus tôt –, est occasion de vifs débats sur l’avenir de la profession et de polémiques sur la pertinence contemporaine du terme d’orientaliste. Nombre de congressistes sont de plus en plus insatisfaits d’un terme qui n’indique ni discipline ni région. Ils décident que désormais ils se réuniront en « Congrès international des sciences humaines en Asie et en Afrique du nord. »

  • 8 Maxime Rodinson : « Situation, acquis et problèmes de l’orientalisme islami...

6Lorsque Maxime Rodinson publie « Situation, acquis et problèmes de l’orientalisme islamisant » dans les actes du colloque « Orientalisme, africanisme, américanisme » tenu en mai 1974 à Paris, il a pris acte qu’un « certain nombre de pratiques ont été historiquement bloquées sous le nom d’orientalisme » alors même qu’au XIXe siècle celui-ci avait résulté d’une « aspiration à un élargissement de l’humanisme de la Renaissance », on avait « voulu ajouter, aux civilisations modèles classiques » d’autres civilisations, dans un mouvement lié par les sensibilités romantiques et en « réaction à l’universalisme qui dominait la philosophie des lumières. » Il reprend tous les éléments du procès : l’européanocentrisme dont les « inconvénients sont certains », posture associée à « une vision essentialiste et idéaliste des civilisations », la « liaison partielle avec des pratiques politiques impérialistes et avec des visions esthétiques fondées sur l’exotisme » ; la surévaluation « de la croyance à l’omniscience du philologue » face à des connaissances parfois faibles dans le domaine de l’étude culturelle (en situation sociale concrète). Il insiste néanmoins sur la légitime « méfiance » à exercer vis-à-vis de ceux des « spécialistes nationaux » qui « ne sont pas toujours dégagés des démarches archaïques et des idéologies anciennes sous leur forme dogmatique antihistorique, position revivifiée par les idéologies nationalistes nouvelles ». Sa proposition est d’« écouter les savants « nationaux », et collaborer avec eux à égalité quelles que soient les difficultés de cette collaboration » et d’intégrer « les domaines marginalisés ou dédaignés par la recherche classique » dans le « cadre des démarches sociologiques et anthropologiques » de la science la plus moderne. Et « s’insérer, même si c’est là le plus difficile, dans les courants d’idées contemporaines des peuples concernés, dans leurs représentations de leurs propres problèmes, non pour se soumettre servilement à leurs modes ou à leurs tendances idéologiques, mais pour tirer fruit de leurs interrogations »8.

2. Orientalism d’Edward Saïd : controverses et retours sur soi (1980-2003)

  • 9 L'Orientalisme, 1978, 2005, p. 15, 34, 180, 25, 55.

7L’Orientalisme. L’Orient créé par l’Occident, dont le sous-titre est d’emblée polémique dans la traduction française, synthétise l’ensemble des critiques portées dans les deux précédentes décennies mais en radicalise nombre d’aspects. Edward Saïd considère non seulement la discipline universitaire et savante mais également l’imaginaire européen ayant généré à son avis des discours intrinsèquement liés aux diverses colonisations modernes chez les écrivains et les philosophes et pas seulement les théoriciens de la politique et les administrateurs d’empire (britannique, français mais également américain au XXe siècle). L’orientalisme aurait autoritairement restructuré l’Orient y compris dans « les anthologies de textes tirés de la littérature orientale, les récits de voyages, les fictions orientales. » Enfermés dans leur culture livresque classique, les orientalistes, amateurs comme professionnels, ne se seraient pas intéressé aux individus ni même à la « pluralité humaine. » Les « découvertes érudites, la reconstruction philologique, l’analyse psychologique, la description de paysages ou la description sociologique » auraient été des « moyens » de servir des intérêts impérialistes, de domination occidentale par le biais, notamment, d’un « pouvoir culturel » (« comme dans les orthodoxies et les canons qui régissent le goût, les valeurs, les textes »). D’où cette conclusion violente : « Le savoir sur l’Orient, parce qu’il est né de la force, crée en un sens l’Orient, l’Oriental et son monde »9.

  • 10 Culture and Imperialism, Chatto and Windus, 1993, tr. fr. 2000, p. 25.

  • 11 Cette postface écrite à New York en mars 1994 paraît dans une réédition am...

  • 12 « Postface » (1994), L’Orientalisme, 356.

  • 13 Idem, p. 356.

8Dans Culture et impérialisme en 1992, il reconnaît qu’il a « laissé de côté » « certains livres, articles, auteurs et idées » : « J’ai préféré examiner ce que j’estime important et fondamental : je reconnais d’avance que la sélectivité et le choix délibéré ont régné. J’espère que les lecteurs et critiques de ce livre s’en serviront pour prolonger la recherche et la réflexion sur l’expérience historique de l’impérialisme »10. Cherchant à lutter contre ce qu’il estime être de mauvaises interprétations de ses thèses, Edward Saïd décide à deux reprises d’accompagner les rééditions de son ouvrage d’écrits péritextuels : une « postface », un peu plus de quinze ans après la première publication, en 1994, puis une « préface » en 200311. Ces deux interventions montrent l’inquiétude d’un homme qui estime que certaines lectures de son livre ont trahi sa pensée notamment par le biais des traductions – dont il déclare n’avoir aucune idée pour certaines, « prolifération polymorphe » à laquelle il ne s’attendait pas »12. Son ouvrage serait devenu à ses yeux « toute une série de livres différents », comme un « livre collectif » qui le « dépasse en tant qu’auteur »13.

  • 14 François Pouillon : « Mort et résurrection de l’orientalisme », in Après l...

  • 15 « Postface » (1994), p. 366-367. Edward Saïd concède en 1994 que « L’Orien...

9Le fait qu’il ait trouvé des « cautions multiples » « extérieures au champ de spécialité : politiques, identitaires, littéraires et idéologiques »14 est certes apprécié par Edward Saïd. Il se dit « heureux et flatté » qu’Orientalism « ait souvent contribué au renouvellement des études des africanistes et des spécialistes de l’Inde, des analyses de l’histoire des masses opprimées, à la reconfiguration de l’anthropologie postcoloniale, des sciences politiques, de l’histoire de l’art, de la critique littéraire, de la musicologie, et aussi de l’ample développement de nouveaux discours sur les minorités et le féminisme »15.

  • 16 Edward Saïd s’était néanmoins adressé des critiques dès 1978 : « ce livre ...

  • 17 Irwin : « Les vrais discours de l’orientalisme », in Après l’Orientalisme,...

10Certains commentateurs ne manquent pas de souligner comme étant de l’obstination idéologique le fait qu’Edward Saïd n’ait jamais corrigé ses erreurs factuelles ou comblé les failles de son érudition. Dans The Lust of knowing (Pour le goût du savoir) en 2006, l’arabisant Robert Irwing défend l’entreprise orientaliste savante et plus largement créatrice en revenant sur le parcours de figures orientalistes éminentes depuis l’antiquité. Il adresse de sévères reproches à Edward Saïd qui a installé une périodisation moderniste bien trop restreinte à ses yeux, et n’a pas pris en compte les orientalistes appartenant à des pays qui n’eurent pas d’empires coloniaux, et surtout les personnalités les plus singulièrement libres16. Le même revient dans une conférence prononcée à Paris en 2009, sur les « limites chronologiques et topographiques complètement arbitraires établies par Saïd et ses disciples »17.

  • 18 « Postface » (1994), p. 363, p. 367.

  • 19 Idem, 371, le mot en italiques est en français dans le texte.

  • 20 « Préface », L’Orientalisme, p. VI.

  • 21 « Postface », L’Orientalisme, p. 379.

11Edward Saïd a nuancé certaines déclarations de son texte initial, notamment pour ce qui est l’étude des orientalismes littéraires, s’est inquiété que l’on ait pu lire sur le même plan ses analyses de Chateaubriand et de Flaubert par exemple, ou celles concernant Burton18. Pour autant il maintient qu’il existe à son avis « de fortes affiliations entre l’orientalisme et l’imagination littéraire, ainsi que la conscience impériale »19. L’infléchissement de son analyse de « l’intérêt de Goethe pour l’islam et en particulier pour le poète Hafiz – cette passion dévorante »20, est le plus remarquable vers la fin de sa vie. Plus généralement, sa reconnaissance de l’entreprise des créateurs s’inscrit dans le salut qu’il adresse aux « étudiants et les enseignants (qui) ont travaillé assidûment pour étendre le champ des sujets d’étude de manière à inclure la littérature produite par les femmes, les artistes et les penseurs non européens et autres créateurs marginalisés »21.

  • 22 « L’humanisme se nourrit de l’initiative individuelle et de l’intuition pe...

  • 23 « Préface », L’Orientalisme, p. IX. Dans le dernier texte publié de son vi...

  • 24 « Préface », L’Orientalisme, p. VII.

12L’oriental exilé en Occident, devenu professeur de littérature anglaise et comparée dans l’institution universitaire américaine, est certes demeuré un intellectuel engagé, mais en est venu à estimer de plus en plus que l’exercice d’un certain « humanisme »22, lié à « nos capacités interprétatives rationnelles » est le dernier barrage devant toutes sortes d’extrémismes. Il lui paraît urgent de « renouer avec la pratique d’un discours mondial laïque et rationnel »23 et en vient à parier pour « l’hospitalité », le chercheur devant « faire activement, en lui-même, une place à l’Autre étranger », ce qui serait la « dimension la plus importante » de sa « mission »24.

  • 25 Le séminaire « Orientalismes » créé à l’École Normale Supérieure en janvie...

3. De quelques chantiers pour la recherche en lettres, sciences humaines et sociales25

  • 26 Edward Said, L’Orientalisme, 2005, p. 182, p. 183.

  • 27 James Clifford : « Les questions théoriques que soulève L’Orientalisme, en...

  • 28 Voir, à titre d’exemple Ignac Goldziher. Un autre orientalisme ? Céline Tr...

  • 29 L’Orientalisme, 37, 37, 58. Voir L’Orient des saint-simoniens, 2006, 294 p.

13Edward Saïd déclare en 1978 qu’une « autre tradition tire sa légitimité du fait particulièrement contraignant de résider en Orient et d’avoir avec lui un contact existentiel véritable […]. Résider en Orient implique jusqu’à un certain point une expérience et un témoignage personnel »26. A-t-il existé des modes de textualisations propres à ces « résidents » ? S’il est vrai que la réalité humaine authentique « est enracinée dans la rencontre orale et le discours réciproque, par opposition aux processus de l’écriture ou de l’imagination visuelle », peut-on opposer simplement « l’expérience à la textualité »27 ? Edward Saïd dit avoir décrit des « moments » et s’être « contenté de suggérer l’existence d’un tout plus vaste, détaillé, marqué de personnages, de textes et d’événements passionnants »28. Tel serait en effet l’enjeu d’une autre histoire. Le même avance l’idée de la possibilité d’une perspective qui soit « libertaire, ni répressive ni manipulatrice » mais n’en étudie pas d’exemples. Saïd cite d’un mot, « l’utopisme », un courant moderne qui traversa le siècle et donc aussi les orientalismes29.

  • 30 Nicole Lapierre : « De la mobilité biographique au mouvement des idées, de...

  • 31 Idem, p. 96.

14Il s’agirait alors d’envisager l’étude de l’aventure intellectuelle des résidents occidentaux dans les pays d’Orient de la Renaissance au milieu du XXe siècle, leur marginalité créatrice de « dépaysés » devenus orientalistes de terrain par leurs activités de traduction, d’édition critiques exotériques et ésotériques et leurs médiations culturelles (revues, activités publiques). Certes, ce groupe est hétérogène, composé d’exilés, d’émigrés, d’expatriés, de réfugiés, certes on peut penser ailleurs sans se déplacer et penser à l’identique en résidant ailleurs30, mais l’hypothèse serait que nombre de ces intellectuels ont exercé un autre orientalisme, une pensée et une action inventive entre Occident et Orient, en pays d’Orient. « La diversité des groupes d’appartenance, d’identification et d’intérêt (les classes, mais aussi les générations, les milieux professionnels, les sphères religieuses, les cercles de pensée, etc.), en multipliant les points de vue en compétition, crée une dynamique, suscite des ébranlements réciproques, et favorise l’émergence de conceptions nouvelles et de « synthèses éclectiques » inédites »31.

  • 32 François Pouillon : « Mort et résurrection de l’orientalisme », in Après l...

  • 33 Jean-Claude Vatin : « Après l’orientalisme, l’Orient des Orientaux ? », in...

15Une partie de ces questions est discutée dans l’ouvrage collectif Après l’Orientalisme. L’Orient créé par l’Orient (2011). Sans contester aucunement le procès de l’ancien orientalisme, établi dans les années soixante en France comme nous l’avons vu : « méconnaissance des débats théoriques des sciences sociales », « refus de l’actualité », « incapacité attestée à faire entrer dans le jeu scientifique des ressortissants des sociétés étudiées », « importance quasi religieuse conférée aux textes », essentialisation anhistorique, les auteurs soutiennent que pendant que les études postcoloniales triomphaient en appui sur Orientalism dans le monde anglo-saxon, des chercheurs français en sciences sociales découvraient que la « science coloniale » que l’on disait avoir été l’orientalisme avait été « moins monolithique » que la nouvelle vulgate le disait, qu’il y avait eu une « diversité des auteurs, de leur inscription institutionnelle, de leur rapport au pouvoir, qu’enfin le savoir orientaliste avait été « retravaillé localement dans le cadre des sociétés de la ‘‘périphérie’’«  et que des produits en avaient été « récupérés, réappropriés » dans « le cadre d’enjeux nouveaux, nationaux ou ethniques » contemporains. Ce serait tout l’enjeu à leurs yeux de l’étude de réemploi de « produits matériels », du passage de l’impérial à l’identitaire national, du « transfert de souveraineté, d’héritage sur place, d’institution, de collections, de productions inscrites dans le territoire »32. D’où la nécessité de « revenir aux principaux intéressés, membres des sociétés locales » comme interlocuteurs, de « rendre aux histoires, aux lieux, aux faits, toute leur diversité », de « rendre l’Orient (pluriel) aux Orientaux »33.

16On comprend dès lors la nécessité d’établir de nouveaux corpus, d’éditer des dictionnaires dans lesquels une attention serait portée aux dimensions biographiques (formation, promotion, réseaux personnels, mouvances, solidarités en parallèle à une attention politique des orientalistes), cet inventaire critique devant aboutir à des portraits de transfuges, de passeurs, d’intermédiaires, de « drogmans », de révoltés, de résistants comme de conformistes académiques. Pour autant le récent et premier Dictionnaire des orientalistes de langue française (2008) souffre de la trop grande extensivité de la définition faite au qualificatif d’« orientaliste » car on y retrouve une sélection d’un millier de biographies de savants et de lettrés mais également de créateurs « orientophiles » et d’écrivains francophones orientaux qui ont leur place dans un autre cadre. Quant au pourcentage restreint d’orientalistes orientaux et de savants occidentaux résidents (souvent subalternisés), qui s’y trouvent remis au premier plan depuis la périphérie orientale, il n’appuie pas toujours la thèse de la prise en compte d’autres pratiques de l’orientalisme.

  • 34 Mercedes Volait, Les Fous du Caire, p. 22, 18, 17, 29.

  • 35 Voir à ce propos la récente exposition autour de la personnalité d’un l’ar...

17Un très bon exemple de déplacement du regard est par contre fourni par Mercedes Volait dans Les Fous du Caire (2009), ouvrage dans lequel l’auteur présente les « fabrications patrimoniales repérées sur le terrain égyptien », et porte toute son attention non plus seulement aux discours et représentations « mais aussi et surtout à l’univers des pratiques. » Elle réhabilite la « capacité d’initiative individuelle », assume le tournant biographique des sciences sociales ce qui ne peut que retenir les littéraires autant que les historiens. Au-delà d’Orientalism, et dans la lignée des ‘‘subalternistes’’ indiens, elle invite à décliner l’orientalisme au pluriel, à penser l’hybridité de nombre d’acteurs (notamment résidents) par delà tout binarisme Orient/Occident. Elle place l’accent sur la multitude d’acteurs minoritaires et hétérodoxes dans les dispositifs impériaux, et qui furent à la source de la « conscience et de l’apostolat patrimoniaux »34. Elle s’intéresse aux « passions privées », à leurs écrits et actions en Orient et à l’écho de ceux-ci en Occident, voulant déplacer le regard du camp des savants vers celui des amateurs et des dilettantes, des autodidactes néanmoins érudits entretenant des relations complexes avec les milieux académiques, suivant de près les infortunes de telles pratiques dans le destin des acteurs35. Une autre histoire des patrimoines émerge alors, « l’invention » de la conservation apparaissant comme naissant sur les confins des pratiques institutionnelles, portée par des intellectuels excentrés, d’Orient comme d’Occident. Resterait à estimer le degré de transfert d’une telle enquête au plus près des orientalistes de terrain dans tous les domaines du champ.

  • 36 Voir L’Orient dans les revues, l’Orient dans les revues, Daniel Lançon (di...

18Méthodologiquement, il est un chantier littéraire dont les résultats pourraient s’avérer très fructueux : l’étude des revues des années trente du XIXe siècle à la fin des années soixante du XXe siècle. La « matière » orientale de ces milliers de pages est vaste et les représentations de l’Orient, accueillies dans la connivence intellectuelle et sociale d’une entreprise dialogique, apparaissent dans leur grande hétérogénéité ce qui permet de discuter la validité de la vulgate orientaliste36. La présence ou l’absence du politique est ainsi hautement significative, les réflexions les plus contradictoires étant émises quant à une « politique orientale » à suivre, à encourager (« mission civilisatrice ») ou à dénoncer (situations coloniales). Les débats sont vifs entre revues (ou entre rédacteurs d’une même revue), les relations de convergence ou d’opposition renvoyant à des lectorats certainement bien différents. La revue se révèle souvent le lieu d’accueil de visées modernistes, voire utopistes : celui d’un Orient contemporain, associé à l’Occident nouveau du progrès des Lumières, « régénéré » par lui, d’où néanmoins les inévitables conflits de points de vue autour des modes de relation à avoir avec ces pays d’Orient. Une tension se fait néanmoins rapidement jour après le milieu du XIXe siècle, entre les héritages culturels dont un ensemble de contrées dites « orientales » auraient été les témoins, les dépositaires, les légataires, – mais ne le seraient plus – et l’actualité troublée de ces mêmes pays, présent désorientant autant que désorienté. À cet égard, à partir des années 1880, il ne sera cependant plus seulement question de l’inscription et de la diffusion des seuls discours occidentaux sur l’Orient, par le biais de la traduction d’œuvres ou de paroles rapportées (nécessairement peu nombreuses), mais d’une prise de parole des Orientaux dans des organes de presse. Un pas décisif est accompli lorsqu’une parole se développe au sein de périodiques publiés dans l’Orient turc, syro-libanais ou égyptien, dans les premières décennies du nouveau siècle. Le renversement énonciatif se confirme par l’émergence de revues europhones d’Orient, dans un Orient de futurs états-nations, travaillant souvent à un dégagement des idéologies coloniales dès avant les indépendances politiques, se situant dans le débat d’orientalité de leurs espaces spécifiques.

  • 37 Culture and Imperialism, o. c., p. 14.

  • 38 « Postface » (1994), 2005, p. 357, p. 359.

  • 39 Idem, p. 371.

  • 40 Idem, p. 366. « Nulle part je ne prétends que l’orientalisme est malfaisan...

19Si l’on se déplace enfin vers les thématiques à reconsidérer, il en est une qui pourrait mériter toute l’attention des chercheurs, à nouveaux frais : celle de l’étude des discours occidentaux tenus sur l’Islam, à bonne distance des anciens conflits idéologiques mais également des instrumentalisations actuelles. Il est ainsi significatif que dans l’introduction de Culture et impérialisme qu’il écrit à New-York en 1992, Edward Saïd s’emporte contre ceux qui vantent le bienfait des retours à la « tradition », les « fondamentalistes religieux et nationalistes »37. Il y revient dans sa « Postface » : « En bref, critiquer l’orientalisme, comme je l’ai fait dans mon livre, revient à soutenir l’islamisme et le fondamentalisme musulman », ce que l’auteur n’a pas dit et qu’il conteste à nouveau38. S’il maintient par contre l’idée que « l’intérêt européen pour l’islam ne dérive pas de la curiosité, mais de la crainte de voir la chrétienté exposée à une concurrence monothéiste, culturellement et militairement impressionnante »39, il soutient que la « différence entre les réactions arabes et les autres à L’Orientalisme révèle clairement la mesure dans laquelle des décennies de défaites, de frustrations et d’absence de démocratie ont affecté la vie intellectuelle et culturelle dans les pays arabes »40.

  • 41 Voir, à titre d’exemple, Islamophilies, l’Europe moderne et les arts de l’...

20Il serait intéressant d’examiner la reconnaissance de l’Islam en tant que religion et culture, voire civilisation, du milieu du XVIIe siècle, période marquant le début d’une remise en cause de la tradition dévote dans le cadre d’une lecture chrétienne, jusqu’à l’entre-deux-guerres du XXe siècle, moment de naissance d’une conscience contemporaine des altérités en pleine période impérialiste41. Si les positions islamophobes furent légion, il est aisé de démontrer qu’un autre type de position a existé, y compris en pleine période impérialiste, position si ce n’est islamophile du moins ouverte à l’auto-questionnement comme le pratiquèrent les saint-simoniens et les positivistes. Il convient tout particulièrement de s’intéresser aux écrivains et intellectuels – auteurs qui ne furent pas tous des écrivains de premier plan au sens de la hiérarchisation des pratiques littéraires – pour lesquels l’Islam fut une présence, qu’il se soit agi d’un intérêt intellectuel ou plus affectif, d’une recherche rationaliste ou mystique, intérêt souvent non exempt d’ambivalence voire de passion contrariée pour le Coran ou des problématiques comme le cousinage abrahamique, toutes sortes d’attitudes d’accueil ayant existé.

21Les études littéraires orientalistes peuvent désormais s’appuyer sur un demi-siècle de reconsidérations nationales et internationales. Certaines préconisations présentées dès les années soixante sont sans doute encore à mettre en œuvre mais les énergies ne manquent pas.

Notes

1 « Pour l’étude des sociétés orientales contemporaines », Bruxelles, Correspondance d’Orient, n° 5, 1962.

2 Actes, p. 458-459, cité dans Diogène, n° 44, octobre-décembre 1963, p. 137.

3 N° 44, octobre-décembre 1963, p. 113, 112. Repris dans Orientalism. A Reader, p. 47-56 (en anglais), voir notices bibliographiques complètes à la fin de cette étude.

4 Idem, p. 105.

5 Idem, p. 114.

6 Idem, p. 109, 116, 127.

7 Les réactions à l’article d’Abd el-Malek ne font pas attendre en France : lettre adressée à la direction de Diogène par Claude Cahen, historien du monde musulman médiéval à la Sorbonne, « Correspondance », Diogène, n° 49, janvier-mars 1965, et étude de Francesco Gabrieli, « Apologie de l’orientalisme », Diogène, n° 50, avril-juin 1965, reprise dans Orientalism. A Reader, p. 79-85. Sur l’évolution de la situation entre 1955 et 1980, voir Thomas Brisson, 2008.

8 Maxime Rodinson : « Situation, acquis et problèmes de l’orientalisme islamisant », in Le Mal de voir. Éthnologie et orientalisme : politique et épistémologie, critique et autocritique, Cahiers Jussieu, Université Paris VII, n° 2, contributions aux colloques : « Orientalisme, africanisme, américanisme » (mai 1974), et « Ethnologie et politique au Maghreb » (5 juin 1975), U. G. E., 10/18, p. 243-256.

9 L'Orientalisme, 1978, 2005, p. 15, 34, 180, 25, 55.

10 Culture and Imperialism, Chatto and Windus, 1993, tr. fr. 2000, p. 25.

11 Cette postface écrite à New York en mars 1994 paraît dans une réédition américaine d’Orientalism en 1995. Elle est traduite en français par Claude Wauthier dès la réédition de 1997.

12 « Postface » (1994), L’Orientalisme, 356.

13 Idem, p. 356.

14 François Pouillon : « Mort et résurrection de l’orientalisme », in Après l’Orientalisme, p. 21.

15 « Postface » (1994), p. 366-367. Edward Saïd concède en 1994 que « L’Orientalisme donne l’impression d’avoir été écrit à partir d’une très concrète expérience de déprivation personnelle et de désintégration nationale », p. 364.

16 Edward Saïd s’était néanmoins adressé des critiques dès 1978 : « ce livre est loin d’être une histoire complète ou un compte rendu général de l’orientalisme. Je suis bien conscient de cette insuffisance » (37). Il écrivait avoir décrit des « moments » et s’être « contenté de suggérer l’existence d’un tout plus vaste, détaillé, marqué de personnages, de textes et d’événements passionnants », p. 37. Il est ainsi significatif qu’Edward Saïd ait préfacé l’ouvrage fondamental de Raymond Schwab (La Renaissance orientale. Préface de Louis Renou, Paris, Payot, 1950, 526 p, vaste histoire des orientalismes européens (1750-1900) et de leur retentissement dans les littératures) : The Oriental Renaissance : Europe’s rediscovery of India and the East, 1680-1880, Gene Patterson-Black, Victoria Reinking (trad.), New York, Columbia University Press, 1984.

17 Irwin : « Les vrais discours de l’orientalisme », in Après l’Orientalisme, p. 39.

18 « Postface » (1994), p. 363, p. 367.

19 Idem, 371, le mot en italiques est en français dans le texte.

20 « Préface », L’Orientalisme, p. VI.

21 « Postface », L’Orientalisme, p. 379.

22 « L’humanisme se nourrit de l’initiative individuelle et de l’intuition personnelle, et non d’idées reçues et de respect de l’autorité », « Postface », p. IX.

23 « Préface », L’Orientalisme, p. IX. Dans le dernier texte publié de son vivant, en 2003, Humanisme et démocratie (Fayard, 2005), Saïd rappelle que James Clifford avait montré qu’une « grave contradiction se nichait au cœur de [son] livre, à savoir le conflit entre [sa] prédisposition manifeste et avouée pour l’humanisme d’un côté et l’antihumanisme de [son] sujet et de l’approche [qu’il avait] adoptée de l’autre », 33. « Clifford a correctement perçu que, d’une manière ou d’une autre, l’idéologie antihumaniste de cette théorie [i. e. française, foucaldienne] ne m’avait pas affecté, principalement me semble-t-il, parce que je ne voyais pas (et ne vois toujours pas) dans l’humanisme uniquement les tendances totalitaires et essentialistes que Clifford avait identifiées », p. 34-35.

24 « Préface », L’Orientalisme, p. VII.

25 Le séminaire « Orientalismes » créé à l’École Normale Supérieure en janvier 2008, animé par Dominique Combe, Daniel Lançon, Sarga Moussa et Michel Murat, cherche à explorer les voies d’un orientalisme expérientiel et potentiellement dialogique. Voir le site Orientalismes.net

26 Edward Said, L’Orientalisme, 2005, p. 182, p. 183.

27 James Clifford : « Les questions théoriques que soulève L’Orientalisme, en tant qu’étude de cas d’un discours culturel, ne peuvent cependant pas être réglées en opposant simplement l’expérience à la textualité », « Sur L’Orientalisme », o. c., 1996, p. 256.

28 Voir, à titre d’exemple Ignac Goldziher. Un autre orientalisme ? Céline Trautmann-Waller (dir.), Paris, Librairie orientaliste Paul Geuthner, 2011.

29 L’Orientalisme, 37, 37, 58. Voir L’Orient des saint-simoniens, 2006, 294 p.

30 Nicole Lapierre : « De la mobilité biographique au mouvement des idées, de la condition existentielle d’exilé, d’émigré ou de transfuge social à la dissidence et à la créativité intellectuelles, il n’y a évidemment pas de causalité mécanique, pas d’enchaînement inéluctable, simplement des circonstances favorables », Pensons ailleurs, Paris, Stock, 2004, réédité, Folio/essais, 2006, p. 27.

31 Idem, p. 96.

32 François Pouillon : « Mort et résurrection de l’orientalisme », in Après l’Orientalisme, p. 27, 21, 18, 25, 28, 18, 13, 31-34.

33 Jean-Claude Vatin : « Après l’orientalisme, l’Orient des Orientaux ? », in Après l’orientalisme, p. 7-12.

34 Mercedes Volait, Les Fous du Caire, p. 22, 18, 17, 29.

35 Voir à ce propos la récente exposition autour de la personnalité d’un l’archéologue et aventurier : Visions d’Égypte. Émile Prisse d’Avennes (1807-1879), Paris, Bibliothèque Nationale de France, 2011, 160 p., et les actes à paraître du colloque L’Égypte d’Émile Prisse d’Avennes, artiste et antiquaire, Mercedes Volait (dir.), Le Caire, IFAO, 2012.

36 Voir L’Orient dans les revues, l’Orient dans les revues, Daniel Lançon (dir.), actes des journées d’étude 2010 et 2011 du séminaire Orientalismes (ENS Ulm), Grenoble, ELLUG, à paraître.

37 Culture and Imperialism, o. c., p. 14.

38 « Postface » (1994), 2005, p. 357, p. 359.

39 Idem, p. 371.

40 Idem, p. 366. « Nulle part je ne prétends que l’orientalisme est malfaisant, ou superficiel, et identique dans le travail de chaque orientaliste. Mais je dis bien que la guilde des orientalistes a été historiquement la complice du pouvoir impérial, et ce serait faire preuve d’une bienveillance béate que de soutenir que cette complicité est sans incidence », p. 369.

41 Voir, à titre d’exemple, Islamophilies, l’Europe moderne et les arts de l’Islam, exposition « Le Génie de l’Orient », Rémi Labrusse (dir.), Paris, Somogy, 2011, 400 p.

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Pour citer ce document

Daniel Lançon, «Les études littéraires orientalistes d’hier à demain ou les Orients décomposés et recomposés», La Réserve [En ligne], La Réserve, Livraison du 09 janvier 2016, mis à jour le : 16/01/2016, URL : http://ouvroir.ramure.net/revues/reserve/314-les-etudes-litteraires-orientalistes-d-hier-a-demain-ou-les-orients-decomposes-et-recomposes.

Quelques mots à propos de :  Daniel  Lançon

Université Grenoble Alpes / U.M.R. Litt&Arts – ÉCRIRE