Epopée, Recueil Ouvert : Section 3. L'épopée, problèmes de définition II - Marges et limites
“Les Douze Pairs de France viennent de Belém au Pará…” : héritages et mutations de l’épique médiéval français dans la culture populaire brésilienne
Résumé
Le présent travail analyse les multiples façons dont la culture populaire brésilienne réactualise l’héritage épique médiéval français. Arrivée dans le Nouveau Monde via la História do Imperador Carlos Magno, la matière carolingienne y connaît un large succès auprès de tous les publics. Les prises de voix individuelles et collectives en sont la preuve : l’opposition structurante païens-chrétiens reste opérante et signifiante jusqu’à aujourd’hui dans les conflits politiques, les manifestations culturelles, le folklore afro-brésilien, la littérature de cordel et la musique populaire. Et si Charlemagne et ses Douze Pairs étaient finalement Brésiliens ?
Abstract
“The Twelve Peers arrive from Belém in Pará…”: Legacy and Transformations of Medieval French Epics in Brazilian Popular Culture
The present work investigates on how Brazilian popular culture actualizes its legacy of Medieval French epics. The Carolingian material, transmitted to the New World via the História do Imperador Carlos Magno, knows indeed a large reception by all kinds of readers. Individual and collective voices witness this appropriation: the structural binarism Pagans — Christians is still operating and significant today in political conflicts, cultural events, Afro-Brazilian folklore, cordel (chapbook literature) and popular music. What if Charlemagne and his Twelve Peers were finally Brazilians?
Texte intégral
Os Doze Pares de França
Vêm de Belém do Pará…
— Toquinho
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1 Pour une première orientation à propos du cordel carolingien en particulier...
1Les Douze Pairs de France sortiraient-ils tout droit de la forêt amazonienne ? C’est ce qu’affirme en tout cas l’auteur-compositeur Toquinho dans sa chanson “Os Doze Pares de França”, enregistrée sur l’album Toquinho Cantando — Pequeno Perfil de um Cidadão Comum (“Toquinho chante — Petit profil d’un citoyen commun”) de 1978. Si cette vision peut étonner jusqu’aux spécialistes d’autres genres médiévaux, les férus d’épopée romane connaissent cependant depuis quelques décennies la survivance des thèmes et personnages des chansons de geste en Amérique latine. Parmi les nombreuses genres et formes de culture savante et populaire qui ont absorbé et transformé l’héritage épique européen, le cordel brésilien est peut-être la plus éminente, et d’importants travaux critiques, pas toujours accessibles en français toutefois, lui ont été consacrés1.
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2 Voir Cascudo, Luís da Câmara, “Informação sôbre a História do Imperador Car...
2Le cheminement qui va de la chanson de geste Fierabras (xiie siècle) jusqu’aux textes du cordel carolingien, lui aussi, est connu dans ses grandes lignes. Rappelons-le très brièvement : c’est l’un des dérimages ultérieurs de Fierabras (entre 1470 et 1478), celui de Jehan Bagnyon, notaire originaire de Lausanne, qui, dans sa traduction espagnole par Nicolas de Piemonte (1521), constitue l’hypotexte de la História do Imperador Carlos Magno composée en portugais par Gerônimo Moreira de Carvalho (1728), puis encore augmentée par cet auteur, puis par un autre, Alexandre Gaetano Gomes Flaviense, réduite à plusieurs reprises par la suite, et réimprimée tant au Portugal que dans sa grande et lointaine colonie ultramarine2.
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3 Voir Meyer, Marlyse, “Tem Mouro na Costa ou Carlos Magno ‘Reis’ do Congo”, ...
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4 Voir Cascudo, Luís da Câmara, “Informação sôbre a História do Imperador Car...
3La cellule matricielle des manifestations brésiliennes est donc pour l’essentiel cette História do Imperador Carlos Magno, qui aurait voyagé dans les bagages des colonisateurs3, sans doute déjà dans la version espagnole de Piemonte. Publiée pour la première fois en 1521 à Séville par l’Allemand Jacob Cromberger, dont les travaux d’impression circulent jusqu’au Nouveau Monde, elle entre aussi sur le marché portugais. Les impressions des siècles suivants, de Lisbonne (1615) et de Coïmbra (1732), sont d’autres canaux de diffusion : l’História del Emperador Carlomagno y de los Doce Pares de Francia…4 peut ainsi passer l’Atlantique en partant de l’un ou de l’autre côté de la péninsule ibérique, avant même d’être traduite vers le portugais.
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5 Voir Le Rayonnement de Fierabras dans la littérature européenne, Actes du C...
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6 Voir Mandach, André de, Naissance et développement de la chanson de geste e...
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7 Le 19e Festival Lusofonia à Macao en 2016 a diffusé la tradition de l’Auto ...
4La chanson de geste initiale Fierabras, entrée dans neuf domaines linguistiques par ses héritiers directs ou indirects entre le Moyen Âge et le début du XVIIIe siècle, est peut-être le texte épique médiéval qui a connu la plus vaste diffusion géographique et culturelle5. Sa matière s’est réellement mondialisée, ayant rayonné sous forme épique ou dramatique (via l’Auto de Floripes, notamment) sur le globe entier : originaire d’Europe, elle a créé des traditions vivaces en Amérique du Nord et du Sud comme en Afrique6 ; de récentes manifestations culturelles ont pu les diffuser jusqu’en Asie7. Les nombreuses captations des spectacles circulent aujourd’hui sur les canaux de diffusion en ligne, sans plus aucune limitation géographique.
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8 Langenbruch, Beate, “La Frontière : défi et richesse pour les recherches su...
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9 Langenbruch, Beate, “Pérégrinations transeuropéennes et transatlantiques de...
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10 Langenbruch, Beate, “Charlemagne le Brésilien : la figure de l’empereur co...
5Après avoir récemment étudié le passage des frontières linguistiques et culturelles par cette matière8, puis certains enjeux traductologiques qu’implique son mouvement de va-et-vient entre la France et l’Outre-Atlantique9, enfin l’image de Charlemagne dans la littérature de cordel10, nous nous consacrons aujourd’hui à ses échos épiques dans plusieurs manifestations de la culture populaire brésilienne : ludiques et politiques, dramatiques, littéraires et musicales. Comment le groupe qui dit Nous dans ces représentations modernes s’est-il approprié la très ancienne matière européenne, réinvestissant le legs médiéval avec une nouvelle créativité et renouvelant son point de vue, son idéologie et ses ambitions originels ? Nous réfléchirons au préalable à la façon dont cette matière épique européenne, mais passablement hybride déjà à son arrivée, a pu être accueillie par ceux qui vivent au Nouveau Monde. Ce sont ensuite deux types de réactualisations de la matière carolingienne au Brésil qui nous intéresseront : collectives, à savoir des manifestations socio-politiques et socio-culturelles (la Guerre du Contestado, les congadas et cavalhadas), puis individuelles, dans le cordel et un exemple de lyrisme musical.
I. Un épique métis ? Hypothèses sur l’accueil de la matière médiévale au Brésil
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11 C’est par exemple l’approche de Kunz, Martine, “Cordel, criaçon mestiça”, ...
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12 Saillant, Francine et Araujo, Ana Lucia, “L’esclavage au Brésil : le trava...
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13 Voir Gruzinski, Serge, La Pensée métisse, Paris, Arthème Fayard, 2012 (Plu...
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14 Voir Cascudo, Luís da Câmara, “Informação sôbre a História do Imperador Ca...
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15 Voir Gruzinski, Serge, La Pensée métisse, op. cit., p. 55 sq.
6Quand on pense aux divers héritiers que l’épopée médiévale Fierabras a produits au Brésil, on est tenté de leur appliquer l’étiquette d’un épique métis11, conformément aux stéréotypes rattachés à ce pays d’incontestables mélanges, celui des populations autochtones avec celles qui sont venues et qui viennent encore du monde entier, et bien sûr des différentes cultures qui sont les leurs12. Or, outre le fait que l’idée même du métissage reste parfois articulée à une perspective européocentriste, consciemment ou inconsciemment, le livre de Serge Gruzinski, La Pensée métisse, a mis en évidence toutes les insuffisances que le mot peut impliquer : comme s’il y avait des êtres, communautés ou cultures “pures” en soi, comme si l’identité était un fait unique et non pluriel13. Le cas concret de la chanson de geste Fierabras en est un excellent exemple : ayant déjà voyagé d’une langue à l’autre et franchi nombre de frontières avant d’arriver au Brésil, la matière médiévale y parvient déjà intrinsèquement métisse ou mêlée, s’étant enrichie sur son chemin historique de plusieurs co-textes, médiévaux (comme la Chronique du Pseudo-Turpin ou Speculum historiale de Vincent de Beauvais) ou renaissant (l’épopée italienne), érudits ou populaires (tels les folhetos ibériques), pour former la História do Imperador Carlos Magno dans ses multiples versions14. Sans totalement l’abandonner pour autant, il convient donc de manier le concept du métissage littéraire et culturel avec circonspection et précision, en prêtant une particulière attention aux importantes zones d’incertitude, d’aléatoire et parfois d’insaisissable — caractéristiques clés du métissage pour S. Gruzinski, qui construit à partir d’elles son “modèle du nuage”15 pour décrire cette notion.
7La matière de Fierabras est de facto un apport européen, d’origine et d’essence médiévale, donc exogène, quelle que soit sa propre hétérogénéité, qui rencontre le Nouveau Monde. Comment imaginer sa réception dans ce nouveau territoire, et par un public différent ? À dire vrai, même pour les colonisateurs qui sont les médiateurs de cette conquête du Brésil par la História do Imperador Carlos Magno (et c’en est bien une), la lecture du texte, émanant de leur propre horizon culturel, est différente sous ces nouvelles latitudes. Ce n’est pourtant pas le texte qui a changé en traversant l’Atlantique par bateau, mais ce sont bien ses lecteurs et leur prisme de regard. Qu’y trouvent dorénavant les Portugais et Espagnols originaires de la Vieille Europe ? À une probable nostalgie et émotion de ces expatriés qui lisent la História comme un élément de leur patrimoine individuel et collectif peuvent s’ajouter des effets de lecture particuliers créés par la superposition du chronotope originel aux données de la terre et la situation d’accueil. Les conquistadores ou colonisateurs n’auront ainsi certainement pas manqué d’actualiser dans leur imaginaire le texte qu’ils véhiculent en tenant compte de l’épopée de conquête militaire, commerciale et culturelle qu’ils étaient eux-mêmes en train de vivre et surtout de construire mentalement comme telle. Concrètement, aux guerres de Charlemagne contre l’Autre sarrasin, l’émir Balan et ses païens en Italie, en France, en Espagne et en Terre Sainte, univers carolingien fantasmé dans le contexte médiéval des croisades et de la Reconquista, se superposent alors les affrontements militaires sanglants, les échanges marchands ou autres contacts entre chrétiens d’Europe et populations indigènes ou africaines réduites en esclavage et bien sûrs métissés, qui ont lieu notamment dans le sertaõ du Nordeste et en Amazonie.
8Le manichéisme épique que présente la História do Imperador Carlos Magno peut donc être facilement réinvesti, mais sans doute de façon ambivalente. Dans un premier moment, l’intrigue permet aux colonisateurs de s’identifier aux chrétiens du texte et de projeter schématiquement sur les païens du Nouveau Monde les contours des Sarrasins épiques, en les rejetant dans une altérité globale que n’aurait pas reniée le Moyen Âge — où tous les adversaires non-chrétiens de Charlemagne, qu’ils soient saxons, slaves ou sarrasins, peuvent se trouver catégorisés par une appellation-tiroir, telle que paien, sarazin ou turc. Mais dans ce Nouveau Monde de la Conquête, les imaginaires anciens, indiens ou européens, se troublent, comme le constate Serge Gruzinski pour le Mexique :
16 Ibid., p. 72.
Quant aux conquistadores, ils s’aperçurent rapidement que les vaincus n’étaient ni des juifs ni des musulmans, et que la réalité qu’ils découvraient était plus déroutante qu’ils ne l’avaient imaginée au premier abord. Si tout au début les images tirées des romans de chevalerie leur avaient servi à interpréter ce qu’ils ne pouvaient eux-mêmes s’expliquer, elles se révélèrent d’un faible secours quand il leur fallut entreprendre de gouverner cette terre étrange et diabolique16.
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17 Ibid., p. 76, pour ce paragraphe et toutes les citations.
9Si l’expérience décrite semble transposable dans ses grands traits au Brésil du XVIe siècle, il convient aussi d’en apprécier le contexte particulier. Pas moins meurtrière, ni moins brutale pour les Indiens ou les esclaves d’Afrique que les conquêtes du Mexique ou du Pérou, celle du Brésil se serait caractérisée par une remarquable lenteur et inefficacité administratives, dues à la “faiblesse de la présence portugaise”, qui laissait aussi “une plus grande marge de manœuvre aux groupes d’intérêts et aux individus fixés sur cette terre nouvelle”. Or, ces derniers sont “en partie des degradados, c’est-à-dire des délinquants portugais condamnés à l’exil outre-Atlantique, en partie des aventuriers européens”, électrons libres dont les penchants seraient à l’origine de métissages plus nombreux au Brésil qu’ailleurs : “Davantage que dans les Andes et davantage qu’au Mexique, les frontières entre les populations — Européens, métis, Indiens convertis, Indiens de la forêt — sont mouvantes et floues17.”
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18 Kunz, Martine, “Cordel, criaçon mestiça”, art. cit., p. 26.
10Quelle signification cela a-t-il pour la lecture, ou plutôt, les possibles lectures historiques de notre texte ? Sans qu’on puisse aujourd’hui reconstituer exactement la réception de la História do Imperador Carlos Magno au Brésil par ces différents groupes — hétérogènes en tant que tels par ailleurs — et de siècle en siècle, faute de sources spécifiques, son succès témoigne d’un intérêt très largement partagé. “[H]istória de grandeza”18, histoire de grandeur, la matière épique médiévale permet une identification à quiconque voudrait établir une filiation réelle ou imaginaire avec de lointains ancêtres dont le prestige et l’ancienneté rêvés remonteraient jusqu’à Charlemagne.
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19 Voir Cascudo, Luís da Câmara, “Informação sôbre a História do Imperador Ca...
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20 Meyer, Marlyse, “Tem Mouro na Costa ou Carlos Magno ‘Reis’ do Congo”, art....
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21 Voir l’interview avec l’éphémère président de la République Michel Temer a...
11Du côté des populations colonisées et réduites en esclavage, peut-on réellement imaginer une identification positive avec cet héritage littéraire des envahisseurs meurtriers et oppresseurs ? Aussi surprenant que cela puisse paraître, rien n’interdit de le penser, bien au contraire. On sait qu’en tout cas, au plus tard au XIXe siècle, la História de Carlos Magno s’est imposée dans la quasi-totalité des foyers nordestins, où elle est souvent le seul livre19. Les grands écrivains brésiliens Oswald de Andrade, João Guimarães Rosa, Graciliano Ramos, Cyro dos Anjos ou Monteiro Lobato font des emprunts explicites à sa matière dans leurs œuvres ; le philosophe João Cruz Costa se rappelle d’avoir entendu, enfant, la cuisinière noire de la maison raconter les histoires de Charlemagne ; les intellectuels et leaders de tout bord politique y réfèrent20, jusqu’à aujourd’hui même, prenant l’empereur franc comme modèle, à tort ou à raison21. Tous les groupes sociaux, alphabétisés ou non, ont ainsi accès, d’une façon ou d’une autre, à la matière épique médiévale, la considérant souvent comme une lecture fondamentale et un pilier du patrimoine nordestin, sinon brésilien.
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22 Voir Montero, Luis Humberto Olera, “La ‘Historia de Carlo Magno’ en el des...
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23 Nous renvoyons à la version augmentée du texte par Alexandre Gaetano Gomes...
12Aux convertis de la Conquête, la História do Imperador Carlos Magno (et avant elle, la História del Emperador Carlomagno espagnole) peut en effet offrir des attraits. Vecteur du christianisme dans le Nouveau Monde, elle y est utilisée comme un instrument d’endoctrinement religieux22. Nombreux et prestigieux sont ses exempla de conversion : le baptême du roi Clovis par saint Rémi (Livre I, ch. 423) sous l’instigation de sa femme Clothilde, la défaite honorable de Fierabras (Ferrabrás) contre Olivier (Oliveiros), suivie de sa conversion (Livre II, ch. XVI), l’ascension de la belle païenne Floripas (Floripes), baptisée, puis mariée à Gui de Bourgogne (Livre II, ch. XLVI). Femmes et hommes sont ainsi invités, sinon encouragés à se reconnaître dans les héros d’un livre populaire, séduits par un colonisateur qui, manu militari, devient dominant aussi socialement et culturellement. Le rôle des reliques joué dans le texte, notamment celui du saint Baume, est également important : les miracles produits (comme au livre II, ch. XLVII) confèrent une aura magique à ces héros littéraires convertis, au moyen ou au profit desquels les manifestations transcendantes ont précisément lieu.
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24 Voir Montero, Luis Humberto Olera “La ‘Historia de Carlo Magno’ en el desa...
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25 Cf. Goyet, Florence, Penser sans concepts : fonction de l’épopée guerrière...
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26 Ibid., p. 349.
13Attestée en Amérique dès 1536, seulement quinze ans après sa première édition à Séville, la História del Emperador Carlomagno s’apprécie outre-Atlantique individuellement, mais aussi, et peut-être surtout, lors de lectures collectives à haute voix24. Ce qui est sans doute commun aux différents groupes de lecteurs ultramarins de ces héritiers de la chanson de geste Fierabas en espagnol et en portugais, c’est la fascination exercée par la matière épique médiévale, qui offre incontestablement un rêve de grandeur en temps de crise aigüe, quel que soit le camp dont on est issu. Issue d’une grande et ancienne matière, trouvant une nouvelle légitimité et reconnaissance dans le Nouveau Monde, la História de Carlos Magno peut se réactualiser dans l’hémisphère sud à juste titre comme une épopée : un texte qui permet une sortie honorable d’une réalité en crise25, celle de la Conquête militaire, spirituelle, économique et culturelle, et ce à tous ses lecteurs. Il n’est pas impossible que ce soit précisément l’instabilité constante de ce nouveau contexte qui soit en partie responsable du succès du texte au Brésil, peut-être devenu ainsi, à l’instar de son aînée, la Chanson de Roland, un “outil pour penser le politique”, selon la formule de Florence Goyet26. Comme il offre par ailleurs simplement un bon et passionnant récit de faits d’armes et d’héroïsme, une partie des auditeurs-lecteurs peut aussi y être acquis en épousant le prisme chrétien qu’il propose sans se poser d’autres questions que celle du plaisir du texte.
14Bien évidemment, un rejet total de la matière peut exister : chez des lecteurs refusant d’entrer en contact avec toute manifestation culturelle liée aux colonisateurs ou, symétriquement, par ceux qui, en dépit de leur appartenance au groupe dominant, répugnent à accepter l’idée de la conversion à la pointe de l’épée, et tout texte qui pouvait légitimer et représenter
[…] a ordem unitária que se pretendeu implantar a ferro e a fogo no Novo Mundo : uma fé, uma lei, um rei. O conjunto Carlos Magno-Doze Pares serviu no Brasil para dizer contradições, nostalgias, visões de mundo, da História, pelo que também veicula, numa representação simbólica, da rede de relações que se estabelece e se reproduz na terra colonial. A marca dessas relações : a violência.
27 Meyer, Marlyse, “Tem Mouro na Costa ou Carlos Magno ‘Reis’ do Congo”, art....
[…] l’ordre unitaire qui prétendait s’implanter par le fer et par le feu dans le Nouveau Monde : une foi, une loi, un roi. L’association Charlemagne — Douze Pairs servit au Brésil à dire les contradictions, les nostalgies, les visions du monde, du temps, de l’Histoire, en ce qu’elle véhicule également, dans une représentation symbolique, le réseau de relations qui s’établit et se reproduit dans la terre coloniale. La marque de ces relations : la violence27.
Il n’en demeure pas moins que la diversité et le nombre des témoignages recueillis par la critique attestent l’ampleur de la réception qu’a connue la História do Imperador Carlos Magno.
15De quelle manière cette matière épique d’origine européenne est-elle réinvestie par les Brésiliens de tous les milieux ? Quelles sont les récréations épiques, ludiques et dramatiques ou musicales produits par les milieux populaires, quelles les appropriations politique, spirituelle et artistique de la matière, et comment l’opposition entre les Nôtres et les Autres s’y articule-t-elle ?
II. Réinvestissements politiques et folkoriques de la matière carolingienne au Brésil : le mouvement du Contestado, les congadas et les cavalhadas
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28 Nous ne souhaitons ici qu’aborder les formes spécifiquement brésiliennes d...
16Les réemplois du matériau épique véhiculé par la História de Carlos Magno sont nombreux au Brésil. Souvent marqués par un réel métissage culturel, ils ont été favorisés également par d’autres possibles intertextes carolingiens28. Nous nous intéresserons ici à des manifestations issues de la culture populaire, capables de témoigner à une large échelle de la manière dont un groupe s’empare des rapports du Nous avec les Autres que lui lègue l’héritage épique médiéval. Les trois exemples étudiés, le mouvement du Contestado, les congadas et les cavalhadas, illustrent en particulier la façon dont est réactualisé le groupe que forment Charlemagne et les Douze Pairs, et dont est préservé le manichéisme épique dans de nouveaux contextes sociaux et historiques.
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29 Voir Langenbruch, Beate, Images de l’Allemagne dans quelques chansons de g...
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30 Queiroz, Maurício Vinhas de, Messianismo e conflito social (A Guerra serta...
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31 Ibid., ch. IV, “José Maria, o Messias caboclo”, p. 77-101.
17Le Moyen Âge français, en créant les chansons de geste au tournant des XIe et XIIe siècles, se réapproprie la figure aussi historique que mythique de l’empereur franc, alors que celui-ci est mort depuis trois siècles déjà : l’aura qui l’entoure et la charge symbolique qu’il représente sont encore d’utilité pour la société qui produit ces textes d’un nouveau genre, dans le processus séculaire qui est l’ethnogenèse française29. De façon analogue, le mouvement messianique et social du Contestado au Brésil (1912-1916) renoue avec la matière carolingienne. Les revendications de cette rébellion contre le jeune État brésilien dans le Sud, aux confins du Paraná, de Santa Caterina et de l’Argentine, portent sur la défense des petits fazendeiros et paysans expropriés, parmi lesquels beaucoup sont des caboclos, métis euro-indiens. Le conflit se mue en guerre en 1912, à l’époque du leader charismatique José Maria de Agostinho. Ce dernier succède à deux illustres prédécesseurs, qui avaient fait éclore un grand mouvement messianique, moines portant ou adoptant chacun le nom João Maria30. José Maria, ce (faux ?) moine, guérisseur et “messie caboclo”31, inspire les foules en teintant le conflit d’une savante sémiotique de guerre sainte, dans laquelle est intégré l’héritage épique médiéval :
[…] para si mesmo e para seus seguidores fazia a leitura da História de Carlos Magno e dos Doze Pares de França. No primeiro ajuntamento que organiza, e de Taquaruçu, há atividades devocionais diárias. Rezas, leitura pública da História de Carlos Magno. Mas, também, organização dos primeiros Pares de França.
32 Monteiro, Duglas Teixeira, Os Errantes do Novo Século, São Paulo, Duas Cid...
[…] pour lui-même et pour ses disciples, il faisait la lecture de la História de Carlos Magno e dos Doze Pares de França. Lors du premier rassemblement qu’il organise, celui de Taquaruçu, il y a des activités dévotionnelles quotidiennes. Prière, lecture publique de la História de Carlos Magno. Mais aussi l’organisation des premiers Pairs de France32.
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33 Voir Queiroz, Maurício Vinhas de, Messianismo e conflito social (A Guerra ...
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34 Ibid. p. 149.
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35 Ibid., p. 125.
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36 Cf. ibid., “Atributos e funções dos pares de França”, p. 184-186.
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37 Queiroz, ibid., p. 184, indique qu’à côté de la HCM, les cavalhadas (dont ...
18L’efficacité de l’actualisation de la matière carolingienne repose sur le binarisme épique, qui rejette l’État fédéral dans l’altérité, en le diabolisant explicitement. De l’autre côté, le groupe du Nous investit le camp chrétien, par la désignation d’un souverain, de sa garde d’honneur de vingt-quatre chevaliers, nommés les “Douze Pairs de France”, munis d’épées en bois33, et créés à l’occasion du conflit armé de Caraguatà34, puis d’un conseil délibératif et multiplicateur d’annonces du même nom, formé déjà lors du rassemblement de Taquaruçu35. Un drapeau, une croix verte sur fond blanc36 à la façon des étendards croisés médiévaux, représente la monarchie céleste d’un nouveau type qu’ambitionne d’établir le mouvement. La fréquentation intense de l’hypotexte littéraire ainsi que d’autres festivités folkloriques37 entretiennent aisément cette actualisation auprès des révoltés, créant une forte adhésion émotionnelle entre eux et avec le rôle investi : celui de nouveaux croisés.
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38 Pour des introductions à cette manifestation populaire, voir Meyer, Marlys...
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39 Voir le documentaire en 6 volumes à propos de cette congada, produit par T...
19Le Brésil a développé d’autres réappropriations de la matière épique médiévale, à plus vaste échelle spatio-temporelle : cette fois-ci des mélanges du modèle carolingien avec des traditions africaines. Considérée comme manifestation folklorique du syncrétisme religieux, la congada est un théâtre de rue ou procession afro-brésilienne qui associe musique, chant, danse et éléments historiques38. Elle n’est pas, quant à elle, nordestine, ayant ses hauts lieux dans les états fédéraux plus méridionaux de São Paulo, Espírito Santo, Goiás et Minas Gerais, donc les régions Sudeste / Centre. On y célèbre le couronnement du Roi du Congo (Reis do Congo) et de sa Reine, dans lequel intervient comme trouble-fête l’Ambassadeur d’Angola, en fait fils illégitime du souverain, qu’il provoque militairement à plusieurs reprises, avant d’être pardonné et reconnu. Ce n’est là qu’un exemple de canevas très sommaire pour un spectacle total, dont l’intrigue et la réalisation précises varient de localité en localité. Certaines municipalités, comme celle d’Ilhabela, travaillent sur un texte arrêté et même édité39, alors qu’en d’autres lieux, une part importante est laissée à l’improvisation.
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40 Voir Filgueira de Almeida, Dulce, “Corpo, Cultura e Sincretismo : o Ritual...
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41 Voir Meyer, Marlyse, “Neste Mês do Rosário : indagaçoes sobre congos e con...
20Ces congadas ont lieu en général le jour d’un saint vénéré par la communauté noire, Notre-Dame du Rosaire (Nossa Senhora do Rosário) ou saint Benedito (Santo Benedito), ou un jour d’importante fête catholique (comme Noël ou le 6 janvier, fête des Rois Mages). Ce sont en effet les confréries noires des paroisses qui sont les porteurs et acteurs de cette fête, dont les origines remontent au tout début du XVIIIe siècle40, à tout le moins. Un élément de structuration important sont les ternos (compagnies ou bataillons) : les participants à la fête, costumés, s’organisent par bataillons et défilent selon une hiérarchie sociale stricte, en précédant ou en suivant le groupe central, à savoir le couple royal et ses groupes d’élite, les congos41. La particularité de cette fête réside dans son lien étroit à la violence bilatérale :
A guerra é apresentada em forma de festa, enquanto na festa se apresenta um conteúdo de guerra. Contexto representado : guerra em forme de festa. Contexto da representação : festa em conteúdo de guerra.
42 Cirino, Giovanni, “Atuação missionária no Brasil e na África Centro-Ociden...
La guerre est représentée sous forme de fête, tandis que dans la fête se présente un contenu de guerre. Contexte représenté : guerre sous forme de fête. Contexte de la représentation : fête au contenu de guerre42.
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43 Voir Bastide, Roger, Les religions africaines au Brésil. Contribution à un...
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44 Cf. Andrade, Mário de, Danças dramaticas do Brasil, Belo Horizone, Itatiai...
21Le manichéisme du spectacle est nourri par l’opposition religieuse : le groupe des chrétiens (les représentants du Congo) s’oppose aux païens, associés aux Mozambicains ou Angolais. Roger Bastide mentionne dans son étude de la congada que l’opposition de groupes nationaux africains recoupe aussi des différences sociales notables : l’aristocratie congolaise y fait ainsi face au milieu plus populaire des Mozambicains43. On devine facilement pourquoi le poète Mario de Andrade associe le “thème de Charlemagne et des Pairs” à la congada, qu’il compte parmi les “danses dramatiques”44 : le combat entre chrétiens et Maures, que de nombreuses régions du Brésil (et notamment le Nordeste) connaissent comme thème structurant folklorique ou dramatique (dans l’Auto de Floripes), y est réinvesti et fondu avec les danses et traditions africaines, dont les oppositions historiques et sociales présentent des similitudes. Qui plus est, parfois le souverain carolingien figure en personne dans le spectacle, et à ses côtés, les pairs. En effet, le thème carolingien
[p]ode subsistir numa seqüência completa, como é a do cortejo e batalha singular entre Oliveiros e Ferrabrás, sob os olhos do majestoso Carlos Magno, belo mulato vestido de veludo azul celeste, desfilando na Congada de Sao Benedito em Poços de Caldas, sob a batuta de Sé do Brejo, memória do texto.
45 Meyer, Marlyse, “Tem Mouro na Costa ou Carlos Magno ‘Reis’ do Congo”, loc....
[p]eut subsister en une séquence complète, comme celle du cortège et du duel entre Olivier et Fierabras, sous les yeux du majestueux Charlemagne, beau métis vêtu de velours bleu ciel, défilant dans la Congada de São Benedito à Poços de Caldas, sous la baguette de Zé do Brejo, mémoire du texte45.
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46 Voir Meyer, Marlyse, “Neste Mês do Rosário : indagaçoes sobre congos e con...
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47 Voir Suard, François (éd.), Aspremont. Chanson de geste du XIIe siècle, Pa...
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48 Voir Cirino, Giovanni, “Atuação missionária no Brasil e na África Centro-O...
22Dans la manifestation de Poços de Caldas dans le Minas Gerais, Charlemagne (Carlos Magno) et les Douze Pairs forment en effet un congo, un bataillon46. Témoignage de la congada d’Ilhabela à l’appui, un critique évoque aussi la proximité phonétique entre l’épée Durendal, espada durindana en portugais, que Charlemagne ceint au côté de Roland lors de son adoubement dans la chanson de geste47, et l’épée durumbamba ou zurumbamba que le Roi Congo présente dans un moment crucial de l’intrigue à l’Ambassadeur dans la performance dramatique brésilienne48. Comme l’attestent les nombreuses captations vidéo des congadas disponibles sur internet, la sémiotique du Nous chrétiens et des Autres païens est très accentuée. Costumes, couleurs et symboles consacrent cette opposition binaire, facilement repérable : aux chevaliers chrétiens en couleur bleu ciel, accompagnés par les étendards des saints patrons des Noirs comme Saint Benedito, Sainte Iphigénie et Notre Dame du Rosaire, font face les bataillons païens costumés en rouge, dont certains couvre-chefs sont ornés de cornes diaboliques ; parfois, un leader d’un de ces congos peut même s’appeler Ferrabrás, à l’instar du Sarrazin vaincu par Olivier, puis converti dans la chanson de geste médiévale.
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49 Cf. ibidem, p. 229.
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50 Cf. Bastide, Roger, Les religions africaines au Brésil. Contribution à une...
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51 Cf. ibidem, p. 479 sq.
23L’origine de la congada est obscure. D’aucuns pensent que le canevas dramatique de la congada émane d’autos (jeux dramatiques) composés par les jésuites ibériques à des fins de catéchèse, possiblement déjà en Afrique, et que c’est par le biais des esclaves noirs que ce folklore-carrefour est parvenu au Brésil : l’hypothèse de production est séduisante et possible, mais sans preuves concrètes49. Pas toujours appréciée, ni toujours autorisée par l’Église dans les siècles précédents50, la congada est aujourd’hui un élément important du folklore afro-brésilien, mais de façon non exclusive : les rôles des chrétiens et des Maures ne sont pas forcément distribués en fonction de l’origine supposée des acteurs, et ce sont des manifestations populaires à vaste échelle, accueillant les Brésiliens de toutes les origines51.
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52 Les photos des cavalhadas de Pirenópolis, Goiás, en donnent quelques beaux...
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53 Voir la présentation de la cavalhada de Pirenópolis sur le canal YouTube d...
24Là où la congada associe la vénération rituelle au rire, affectionne les détournements burlesques, les renversements des hiérarchies sociales et de l’épique par la provocation, bref, fait preuve de son caractère carnavalesque, d’autres manifestations folkloriques sont plus proches du premier degré, sans exclure pour autant totalement le comique. Les cavalhadas, “chevauchées”, qui reprennent l’opposition chrétiens — païens, sont largement répandues dans le pays et emploient les mêmes codes couleurs que les précédentes manifestations52. Flexibles dans leur place et rôle, ces défilés et affrontements à cheval peuvent intégrer une congada, en tant qu’événement matinal, ou se célébrer de façon autonome, et ce pendant plusieurs jours. La cavalhada de Pirenópolis dans l’état fédéral du Goiás, qui s’étire sur trois journées, voit ainsi se succéder les éléments structurants de l’épopée médiévale, le combat entre les Douze Pairs chrétiens et les Douze Pairs sarrazins (mouros), puis, la conversion de ces derniers, avant que la liesse populaire ne culmine dans l’ultime journée, un tournoi, où se produit un nombre de participants beaucoup plus important, dans une grande chevauchée costumée et des danses53.
25Ces trois exemples de réappropriations de la matière carolingienne ont illustré son réinvestissement collectif : celui d’un groupement social et politique dans un contexte historique donné, puis ceux d’une paroisse, d’un quartier ou parfois d’une ville entière, mobilisés autour d’un patrimoine folklorique encore vivant aujourd’hui. Nous focaliserons désormais maintenant notre regard sur le phénomène de l’énonciation individuelle, dans deux autres expressions populaires de l’épique d’inspiration médiévale au Brésil.
III. Les voix discrètes du cordel et de la chanson : la poésie populaire d’inspiration carolingienne
1. Nous et les Autres dans le cordel
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54 Le corpus sur lequel nous travaillons actuellement se compose de :
26La História de Carlos Magno n’est en effet pas la seule narration à avoir transmis la matière épique médiévale. Vers la fin du XIXe siècle naît, en particulier grâce au poète nordestin Leandro Gomes de Barros, un genre promis à un énorme succès populaire au Brésil, le cordel. Contrairement aux folhetos en prose du même nom produits au Portugal, le cordel brésilien est versifié ; ses strophes sont régulières, composées de six (sextilha), sept ou dix vers (décima). Leandro Gomes de Barros produit plus de deux cent cordeis, dont deux textes inspirés de la História de Carlos Magno, le diptyque A Batalha de Oliveiros com Ferrabrás et A Prisão de Oliveiros e seus companheiros. Il s’agit là du double noyau du cordel carolingien, groupement libre d’une petite dizaine de textes non directement reliés entre eux et composé par la suite par divers auteurs54, ensemble qui reconduit ainsi une matière active jusqu’à aujourd’hui.
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55 Melo, Veríssimo de, “Literatura de Cordel. Visao historica e aspectos prin...
27Empressées d’entrer dans l’histoire passionnante afin de la transmettre au lecteur, qu’on adresse parfois directement, les voix des auteurs se font souvent discrètes au seuil des tout premiers cordeis carolingiens, ceux de Leandro Gomes de Barros, déjà évoqués, puis Roldão no Leão de Ouro de João Melchíades Ferreira ou O Cavaleiro Roldão de Antonio Eugênio da Silva. Mais bientôt, la plupart des récits se dotent de prologues dont certains n’ont rien à envier à ceux des chansons de geste médiévales : c’est là le lieu où s’affirme le plus clairement la conscience auctoriale. Ils illustrent un prisme de regard qui jusque-là est seulement sous-entendu : “Em geral, o poeta popular nordestino é católico ortodoxo.” (“En général, le poète populaire nordestin est catholique orthodoxe.”)55. Cette perspective, ne fût-elle qu’un ethos de narrateur, reste globalement valable même chez les auteurs les plus récents, comme Stélio Torquato Lima ou Marco Haurélio. Aussi la frontière entre Nous et les Autres qu’amène la matière épique médiévale s’actualise-t-elle aisément : c’est celle qui sépare les chrétiens, défenseurs de l’Église et de “Deus poderoso” (“le puissant Dieu”, Malaco, p. 1) des traîtres perfides comme Ganelon, “grande canalha” (“grande canaille”, AR, p. 14), et des païens, “o inimigos / da cristã religião” (“les ennemis / de la religion chrétienne ”, Malaco, p. 1), adeptes de la “doutrina diabólica” (“doctrine diabolique”, GBC, p. 31). Dans O Guerreiro Bernardo de Cárpio. Exímio vencedor dos doze pares de França de Severino Borges da Silva, cette dernière paraît inclure jusqu’aux rites métis :
Bernardo de Cárpio, [sic] foi
O herói do mundo inteiro,
Reagiu lutas tremendas,
Guerrilhou o estrangeiro
Estraçalhou os Magomas,
Símbolo catimbozeiro. FIM
56 L’adjectif catimbozeiro renvoie au catimbó, la fumée qui encense les assis...
Bernard de Cárpio était
Le héros du monde entier,
Il affronta d’énormes luttes,
Guerroya contre l’étranger,
Déchiqueta les macumbas,
Symbole de sorcellerie56. FIN
28La volonté explicite des auteurs est de montrer les exemples d’un héroïsme exceptionnel : l’ambition épique est donc parfaitement intacte dans cette littérature populaire, qui déclare que les Douze Pairs n’ont pas leur égal aujourd’hui (cf. PO, p. 6), et parmi, eux Roland et Olivier en particulier (M12P, p. 2), suivis de Renaut de Montauban, sans pair dans la chrétienté (Malaco, p. 40) ; même le “fameux” empereur Charlemagne (“famoso”, GPCM, p. 1) rejoint le rang des héros, bien que, dans le cordel de Severino José, ce soit curieusement à titre d’amant exceptionnel et non de guerrier.estement, la valeur exemplaire des héros hérités du Moyen Âge européen et leur “história / de grande admiração” (“histoire admirable”, HCM, v. 4) n’ont pas perdu son intérêt pour les lecteurs modernes brésiliens, susceptibles d’en recevoir des chocs émotionnels tels que leurs cœurs s’arrêteront de battre (“Nesta história, os leitores sentirão choques de parar o coração”, GBC, p. 1). Plus exactement, ces héros ont la propension d’être de vrais emblèmes nationaux, dont la vie est relatée “pour être remémorée dans le cœur brésilien” (“pra ficar memoriáda / no coração brasileiro”, GBC, p. 1). Le long épilogue de la História de Carlos Magno insiste sur le lien entre l’œuvre missionnaire de Charlemagne, défenseur de l’Église et dévoreur de païen (cf. HCM, p. 42), et le devoir de reconnaissance et de mémoire formulé par “[n]ossa pátria brasileira” (“[n]otre patrie brésilienne”, ibid.) en l’année 1978 — anniversaire non de la mort de Charlemagne, mal gré qu’en ait le poète, mais de la bataille de Roncevaux. S’il n’est pas sûr que “todos os brasileiros” (“tous les Brésiliens”, ibid.) aient pieusement commémoré le 15 août 1978, le texte de João Lopes Freire est cependant un cordel-mémoire créé spécifiquement pour cette occasion :
Será lançado este livro
entregue de mão em mão
em memória de Carlos Magno
que lutou com devoção
defendendo a santa igreja
só devorando pagão.
Ce livre sera lancé
Et passé de main en main
En la mémoire de Charlemagne
Qui lutta avec dévotion
Pour la défense de la sainte Église,
Se vouant à la destruction des païens. (ibid.)
29Le lien entre le catholicisme brésilien et la matière carolingienne ne joue pas un rôle majeur dans le cordel le plus récent, les Aventuras de Roldão. Marco Haurélio, en auteur finement documenté et conscient des nombreuses strates dont est composé son hypotexte principal, la História do Imperador Carlos Magno de Jerônimo Moreira de Carvalho, se montre en revanche très attaché à la dimension patrimoniale du modèle épique médiéval, ce Roland, “qui a inspiré, à d’autres époques, les cowboys du Far West américains et les cangaceiros [partisans du banditisme révolutionnaire au Brésil] et vachers nordestins” (AR, préface, p. 2) :
Seus feitos ainda hoje
São cantados no sertão,
Nos romances, cavalhadas,
Nos versos de tradição.
A França o chamou Roland
E o Brasil chama Roldão. (AR, p. 47).
Ses faits encore aujourd’hui
Sont chantés dans le Sertão,
Dans les romances, cavalhadas,
Dans les vers de tradition.
La France l’appela Roland,
Le Brésil l’appelle Roldão.
30Pendant que les termes-clés romances, cavalhadas et versos illustrent les diverses manifestations d’une présence de la matière carolingienne au Brésil, la tradição (“tradition”) autant que Roland (Roldão) riment ici avec le Sertão, l’arrière-pays métonymique du Nordeste. La double appartenance du neveu de Charlemagne aux deux pays et aux deux langues, qui clôt ce cordel, est pour sa part l’affirmation ultime que la tradition épique médiévale fait partie intégrante désormais du patrimoine non seulement français mais aussi brésilien :
Carlos Magno é sertanejo.
57 Kunz, Martine, “Cordel, criaçon mestiça”, loc. cit., p. 28.
Charlemagne est homme du Sertão57.
2. “Os Doze Pares de França” de Toquinho e Belchior
31La nostalgie et le désir qu’est capable de susciter l’épique carolingien encore au XXe siècle, dans un contexte social et historique très particulier, se lit aussi dans la chanson écrite par les auteurs-compositeurs Toquinho (Antonio Pecci Filho) et Belchior (Antonio Carlos Belchior) : “Os Doze Pares de França” (“Les Douze Pairs de France”), citée en exergue. Le titre de l’album Toquinho Cantando — Pequeno Perfil de um Cidadão Comum est exactement contemporain du cordel de João Lopes Freire, A História de Carlos Magno e os doze pares de França, paraissant également en 1978, 1200e anniversaire de la bataille de Roncevaux, associé à l’empereur Charlemagne et à l’épopée médiévale : est-ce une pure coïncidence ?
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58 Nous remercions M. Altamiro Belmiro Rocha Neto pour ces précieuses suggest...
32Au rythme nordestin d’un côco lent (ou d’une ciranda ?)58, elle se passe pourtant de Charlemagne, qui dans certains cordeis semble également passer au second rôle, derrière ses paladins célébrissimes, fondus ici en un groupe de chevaliers indistincts, qui, en l’absence de souverain, congédié (cf. v. 11 sq.), plantent à eux seuls le décor carolingien, aux seuils de cette chanson aux contours de rêve. Un double enracinement est d’emblée perceptible : sortant de Belém, au cœur de l’Amazonie, les Douze Pairs ne sont pas moins originaires de France, et associés à un contexte guerrier, grâce à leurs épées et leurs montures. Plus que dans la matière médiévale cependant, leur effet sur la gent féminine est mis en évidence : l’épique semble s’être mué en force érotique et en lyrisme amoureux, grâce aux chansons gaiment produites par ces chevaliers pour impressionner les jeunes filles là où ils passent (au v. 8 sq., le rejet du groupe au vers final crée un certain effet de surprise), puis grâce à l’inventivité des Douze Pairs en matière d’amour (v. 16), et non en faits de guerre.
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59 Severino José, A Grande Paixão de Carlos Magnos pela Princesa do Anel Enca...
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60 BOF, p. 5 : “Todos eram conhecidos / Pelos Leões das Igreja, / Pois nunca ...
33Même les emblèmes phares du chevalier subissent une modification substantielle de leurs connotations traditionnelles. Les montures, dont la blancheur lunaire est onirique, sont accompagnées de la lance, qui, en double rime, fait écho à la France (v. 1 et v. 5), soulignant son origine ancienne et mythique. Si l’anneau ne fait pas régulièrement partie de l’équipement chevaleresque médiéval, la possible intertextualité avec certains textes épiques anciens, mais aussi avec un cordel de Severino José59 l’associe à la magie, qui a également envahi les épées. Reprenant l’idée d’une particulière lueur qui émane de ces dernières déjà dans le cordel fondateur du corpus carolingien brésilien, A Batalha de Oliveiros com Ferrabrás60, cette luminosité, là encore, n’est pas un élément de la puissance guerrière, mais reliée ici, en place et lieu de la deuxième, à la troisième fonction indoeuropéenne, que Georges Dumézil associe à l’idée de fécondité et d’abondance : les preuves en sont le retour à la matérialité terrestre (v. 14), la production agricole (v. 15), enfin l’amour et la sexualité (v. 16).
34Pourtant, la violence n’est pas totalement absente de la chanson — seulement, elle semble s’être reportée sur le Je, dont la voix est plus perceptible dans la strophe finale, qui recentre en définitive la vision épique des Douze Pairs sur l’énonciateur. L’admiration qui émane du rêve carolingien est toujours collective, certes, ce qu’illustre la reprise de l’apostrophe initiale du cavaleiro, “chevalier” (v. 6), au vers 18, accompagnée cette fois, comme les refrains, d’un chœur féminin. Cependant, la focalisation se faisant désormais sur le Je, c’est le cœur de ce dernier qui est enlevé, comme dans le lyrisme médiéval tardif. Mais contrairement à celui-ci, ce n’est pas la bien-aimée ou le Dieu Amour, mais le rêve des Douze Pairs de France qui déplace le Je au-delà de l’Océan et de la nuit, l’attirant vers les lueurs de l’aube. Le lever du soleil finit par éclairer littéralement le sens de cette transplantation : opposée au Brésil de la nuit, l’aurore désirée vient de l’Est, de l’Europe. L’indécision plane sur le référent de l’épithète “rouge comme une grenade” : les rayons du soleil matinal ? La poitrine du Je, au cœur arraché ? Il n’en demeure pas moins que dans un cas comme dans l’autre, la formulation bate meu peito renvoie à l’expression ancienne battre sa coulpe. Subtilement, le Je s’identifie à un Roland, martyr des temps anciens, ce qui explique aussi le choix particulier de l’orchestration : au bugle (Flügelhorn) guilleret fait face, avec son timbre intrinsèquement élégiaque et sa ligne mélodique plus mélancolique, le cor anglais, qui rappelle l’olifant de Roncevaux…
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61 C’est le reproche fait par les censeurs, cf. le site Documentos revelados ...
35La censure de l’époque de la dictature militaire, qui en a interdit la diffusion, ne s’est pas trompée : bien que le message de cette complainte soit bien plus subtil qu’un simple désamour ou un dénigrement du Brésil au profit de la France61, on y constate un refus de l’épique là où il pourrait signifier la violence. Pourtant, les auteurs maintiennent le rêve carolingien, dans une version nostalgique, mais aussi plus démocratique et populaire, dénuée de souverain, et donnent au Je une discrète silhouette de martyr : sans qu’elle soit expressément nommée, la dictature hérite du rôle traditionnel des Autres païens.
Os Doze Pares de França
Os doze pares de França
Vêm de Belém do Pará
Montando doze ginetes
Mais brancos do que o luar
Vêm de França, anel e lança
Cavaleiro, olê-olá
Cantando uma loa alegre
Para as moças do lugar
Tendo a luz dessas espadas
Não carece o sol raiar
Nem de rei, nem de princesa
Ninguém mais vai precisar
A verdade tem um brilho
Que põe a terra a rodar
Faz nascer mais cedo o milho
Inventa modos de amar
Os doze pares de França
Cavaleiro, olê-olá
Vão levar meu coração
Pro outro lado do mar
Pro lado de lá da noite
Lá pras bandas da manhã
Onde o sol bate em meu peito
Vermelho como romã
Les Douze Pairs de France
Les Douze Pairs de France
Viennent de Belém du Pará
Montant douze destriers
Plus blancs que le clair de lune
Ils viennent de France, anneau et lance
Chevalier, olé-olà
Contant fleurette en chantant gaiment
Aux jeunes filles du lieu
Quand il y a la lumière de ces épées
L’aube ne manque pas
Ni de roi, ni de princesse
Plus personne n’en a besoin.
À vrai dire, il y a là une luminosité
Qui met la Terre en mouvement
Fait naître plus tôt le maïs
Invente des façons d’aimer
Les Douze Pairs de France
Chevalier, olé-olà
Vont enlever mon cœur
Vers l’autre côté de la mer
Du côté de là-bas, de la nuit
Là-bas, vers les lueurs du matin
Où le soleil frappe ma poitrine
Rouge comme une grenade
Conclusion
36À l’instar des appropriations de la figure mythique de Charlemagne au Moyen Âge, que ce soit du côté français, dans les chansons de geste, ou du côté allemand, via la canonisation de 1165, le Brésil fait pleinement sienne la matière épique médiévale. L’héritage de la História do Imperador Carlos Magno n’y appartient pas à un groupe en particulier : nombreux sont les réinvestissements dans la culture populaire, dont nous avons à peine effleuré quelques exemples et genres, auxquels on pourrait ajouter le repente (le lyrisme populaire nordestin), voire le rap. Même là où une voix individuelle et non un groupe s’en réclame, c’est en tant qu’héraut d’un collectif, d’un Nous qui renvoie dans le cordel à une culture régionale, nordestine, et au-delà, parfois explicitement, à l’identité brésilienne. Dans le cas de la chanson de Toquinho et Belchior encore, l’expression la plus lyrique de notre corpus, l’artiste s’apparente à un Roland : bien que la violence du registre épique ne semble plus le faire rêver, il la subit, en adéquation avec son rôle.
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62 Meyer, Marlyse, “Tem Mouro na Costa ou Carlos Magno ‘Reis’ do Congo”, art....
37L’opposition constamment réactualisée entre chrétiens et Maures se prête ainsi et se prêtera encore à des relectures à la lumière des conflits sociaux brésiliens, qu’elle pourrait ainsi sublimer. Pour l’historienne Marlyse Meyer, ce manichéisme est à lire comme “uma grande metáfora que permitiu compreender o Brasil” (“une grande métaphore qui a permis de comprendre le Brésil”62), et on s’aperçoit que même la critique brésilienne actuelle ne se veut pas toujours exempte de cette identification émotionnelle avec la matière médiévale, qu’elle vienne de France ou de Bretagne, dont le registre épique invite à choisir le camp du Nous :
Carlos Magno é como o nosso querido Rei Artur, que com os seus cavaleiros luta a favor da justiça e contra todos aqueles que possam ameaçar a paz de seu Império.
63 Morgado, Georgia Barbosa, “A Permanência do Imaginário Medieval na Literat...
Charlemagne est comme notre bien-aimé Roi Arthur, qui, en la compagnie de ses chevaliers, lutte pour la justice et contre tous ceux qui pourraient menacer la paix de son Empire63.
Notes
1 Pour une première orientation à propos du cordel carolingien en particulier, on pourra consulter le travail pionnier de Ferreira, Jerusa Pires, Cavalaria em cordel. O passo das aguas mortas [1993], São Paulo, Edusp, 2016 ; puis Correia, João David Pinto, “L’épopée médiévale dans les traditions populaires portugaise et brésilienne”, in Bianciotto, Gabriel et Galderisi, Claudio (éd.), L’Épopée romane. Actes du XVe Congrès international Rencesvals, Poitiers, 21-27 août 2000, Poitiers, Université de Poitiers, CESCM, 2002, t. 1, p. 15-29 ; Borges, Francisca Neuma Fechine, “Tradição e contemporaneidade no ciclo carolíngio da literatura de cordel brasileira”, ibid., t. 1., p. 87-95 ; Cantel, Raymond, “De Roland à Lampião ou la littérature populaire du Nordeste brésilien”, Études, Littératures orales, Paris, 1979, p. 27-63, réédité dans Cantel, Raymond, La Littérature populaire brésilienne, nouvelle édition augmentée, Poitiers, Centre de Recherches Latino-Américaines, 2005, p. 47-84. Sur le cordel plus généralement, voir Slater, Candice, Stories on a string : The Brazilian Literatura de Cordel, Berkeley, University of California Press, 1982 ; Meyer, Marlyse, Caminhos do imaginário no Brasil, São Paulo, Edusp, 1993 ; Santos, Idelette Muzart Fonseca dos, La Littérature de cordel au Brésil : mémoire des voix, grenier d’histoires, Paris, L’Harmattan, 1997 (Recherches et documents Amériques latines). Nous signalons également la thèse en cours de Bastos, Raïsa França, Mouvance de la légende carolingienne jusqu’au XXe siécle brésilien : étude d’un transfert culturel, sous la direction d’Idelette Muzart Fonseca dos Santos et Camille Dumoulié, à Paris Ouest Nanterre.
2 Voir Cascudo, Luís da Câmara, “Informação sôbre a História do Imperador Carlos Magno e dos Doze Pares de França”, in Cinco livros do povo, João Pessoa, Editora Universitária UFPB, 2e éd., 1979, p. 439-445, et Correia, João David Pinto, “L’épopée médiévale…”, art. cit., notamment p. 20-24.
3 Voir Meyer, Marlyse, “Tem Mouro na Costa ou Carlos Magno ‘Reis’ do Congo”, in Caminhos do imaginário no Brasil, op. cit., p. 149, qui réfère à Leonard, Irving, Los Libros del Conquistador, Mexico, Fondo de Cultura, 1953.
4 Voir Cascudo, Luís da Câmara, “Informação sôbre a História do Imperador Carlos Magno e dos Doze Pares de França”, art. cit., p. 444 sq.
5 Voir Le Rayonnement de Fierabras dans la littérature européenne, Actes du Colloque international des 6 et 7 décembre 2002, dir. Marc Le Person, Lyon, APRIME, “C.E.D.I.C, 21”, 2003.
6 Voir Mandach, André de, Naissance et développement de la chanson de geste en Europe, V. La Geste de Fierabras. Le jeu du réel et de l’invraisemblable, Genève, Droz, 1987 (Publications romanes et françaises CLXXVII), p. 178-184. La thèse de doctorat d’Alexandra Gouvêa Dumas, soutenue à 2011 à Nanterre, co-dirigée par Armindo Jorge de Carvalho Bião (UFBA) Idelette Muzart-Fonseca dos Santos (Paris Ouest Nanterre La Défense) présente une étude comparative de deux traditions dramatiques carolingiennes, l’Auto de Floripes à Príncipe, São Tomé e Príncipe, et la Lutte des Maures et des Chrétiens à Prado, Bahia, au Brésil : https://bdr.parisnanterre.fr/theses/internet/2011PA100221-1.pdf [consulté le 16/10/2019].
7 Le 19e Festival Lusofonia à Macao en 2016 a diffusé la tradition de l’Auto de Floripes de Príncipe, il en existe en ligne des captations intéressantes, mais d’une qualité assez moyenne, voir https://www.youtube.com/watch ?v =f9mbgFFpEHE [consulté le 16/10/2019].
8 Langenbruch, Beate, “La Frontière : défi et richesse pour les recherches sur l’épique médiéval”, in Lodén, Sofia et Obry, Vanessa (éd.), L’expérience des frontières et les littératures de l’Europe médiévale, Paris, Champion, 2019 (CCCMA, 26), p. 153-174.
9 Langenbruch, Beate, “Pérégrinations transeuropéennes et transatlantiques de la matière épique médiévale : enjeux de traduction, entre la France et le Brésil”, in Lautel-Ribstein, Florence et Buhot de Launay, Marc-André (éd.), Archéologies de la traduction, Classiques Garnier (Translatio), à paraître en 2019.
10 Langenbruch, Beate, “Charlemagne le Brésilien : la figure de l’empereur construite par le cordel du Nordeste”, in Kullmann, Dorothea, XXIe Congrès International de la Société Rencesvals, 13-17 août 2018, Toronto, Pontifical Institute of Mediaeval Studies, à paraître en 2020.
11 C’est par exemple l’approche de Kunz, Martine, “Cordel, criaçon mestiça”, Cultura critica, n° 6 (2008), p. 26-32.
12 Saillant, Francine et Araujo, Ana Lucia, “L’esclavage au Brésil : le travail du mouvement noir”, Ethnologie française, vol. 37, n° 3 (2007), p. 457-466, relativisent la réalité du “mythe de la démocratie raciale”, dont le sociologue brésilien Gilberto Freyre fut l’un des promoteurs : “Ce mythe suppose une vision harmonieuse du vécu des rapports sociaux et interraciaux, étant entendu que la ‘race’ prend ici un sens plus culturel que biologique. Il implique une incorporation phagocytaire de la diversité des apports historiques et culturels de diverses populations à la société brésilienne, au profit d’une identité unique.” (p. 457).
13 Voir Gruzinski, Serge, La Pensée métisse, Paris, Arthème Fayard, 2012 (Pluriel), ch. II, “Mélanges et métissages”, p. 33-57.
14 Voir Cascudo, Luís da Câmara, “Informação sôbre a História do Imperador Carlos Magno e dos Doze Pares de França”, art. cit., et Correia, João David Pinto, “L’épopée médiévale…”, art. cit., notamment p. 20-24.
15 Voir Gruzinski, Serge, La Pensée métisse, op. cit., p. 55 sq.
16 Ibid., p. 72.
17 Ibid., p. 76, pour ce paragraphe et toutes les citations.
18 Kunz, Martine, “Cordel, criaçon mestiça”, art. cit., p. 26.
19 Voir Cascudo, Luís da Câmara, “Informação sôbre a História do Imperador Carlos Magno e dos Doze Pares de França”, art. cit., p. 441.
20 Meyer, Marlyse, “Tem Mouro na Costa ou Carlos Magno ‘Reis’ do Congo”, art. cit.
21 Voir l’interview avec l’éphémère président de la République Michel Temer avec le journal conservateur O Globo en septembre 2016 https://oglobo.globo.com/brasil/me-sinto-como-carlos-magno-diz-presidente-michel-temer-20087374, [consulté le 17/10/2019], et les réactions controversées que ses affirmations ont suscitées, https://oglobo.globo.com/brasil/temer-reconhece-que-se-confundiu-ao-relacionar-carlos-magno-tavola-redonda-20091911 [consulté le 17/10/2019].
22 Voir Montero, Luis Humberto Olera, “La ‘Historia de Carlo Magno’ en el desarrollo del romancero a la décima espinela”, Revista Chilena de Literatura, n° 78 (2011), en ligne : https://web.archive.org/web/20131231074431/http://revistaliteratura.uchile.cl/index.php/RCL/article/viewArticle/11021/11437 [consulté le 16/10/2019].
23 Nous renvoyons à la version augmentée du texte par Alexandre Gaetano Gomes Flaviense, Historia do imperador Carlos Magno e dos doze paros de França, traduzida do castelhano, por Jeronymo Moreira de Carvalho... e seguida da de Bernardo del Carpio que venceu em batalha aos doze pares de França, Rio de Janeiro / Paris / Lisbonne, Garnier, 1892, disponible sur Gallica, https://gallica.bnf.fr/ark :/12148/bpt6k11648284/f5.image [consulté le 16/10/2019], ainsi qu’à la version espagnole de 1780, également en ligne : http://bibliotecavirtualdefensa.es/BVMDefensa/i18n/consulta/registro.cmd?id=1641 [consulté le 16/10/2019].
24 Voir Montero, Luis Humberto Olera “La ‘Historia de Carlo Magno’ en el desarrollo del romancero a la décima espinela”, art. cit., qui réfère à Saavedra, Yolando Pino, “La Historia de Carlomagno y de los Doce Pares de Francia en Chile”, Folklore Américas, n° 26 (1966), p. 1-29, pour la première attestation américaine et celle de l’envoi de 10 exemplaires de la Historia vers les Amériques en 1586.
25 Cf. Goyet, Florence, Penser sans concepts : fonction de l’épopée guerrière, Paris, Champion, 2006, p. 557 : “ […] l’épopée est un texte qui résout une crise politique contemporaine, insoluble autrement, en affrontant les valeurs antagonistes dans des personnages qu’elle construit pour cela. Elle permet ainsi au public de voir ces valeurs ‘jouer’ devant lui, elle lui donne une prise intellectuelle sur le présent chaotique.”
26 Ibid., p. 349.
27 Meyer, Marlyse, “Tem Mouro na Costa ou Carlos Magno ‘Reis’ do Congo”, art. cit., p. 156. Sauf mention contraire, toutes les traductions dans le présent travail sont les nôtres.
28 Nous ne souhaitons ici qu’aborder les formes spécifiquement brésiliennes des réadaptations : l’Auto de Floripas, par exemple ou les romanceiros qui sont déjà joués et lus dans la péninsule ibérique ne font pas ainsi partie de nos réflexions, bien qu’ils aient pu promouvoir aussi la connaissance de la matière carolingienne au Brésil, aux côtés de la HCM.
29 Voir Langenbruch, Beate, Images de l’Allemagne dans quelques chansons de geste des douzième et treizième siècles, thèse de doctorat soutenue à l’Université de Rouen, dir. Jean Maurice, 2007.
30 Queiroz, Maurício Vinhas de, Messianismo e conflito social (A Guerra sertaneja do Contestado 1912-1916), São Paulo, Ática, 1981(Ensaios, 23), ch. II, “O Profeta João Maria : Realidade e mito”, p. 49-63.
31 Ibid., ch. IV, “José Maria, o Messias caboclo”, p. 77-101.
32 Monteiro, Duglas Teixeira, Os Errantes do Novo Século, São Paulo, Duas Cidades, 1974, p. 271, que nous citons par l’intermédiaire de Meyer, Marlyse, “Tem Mouro na Costa ou Carlos Magno ‘Reis’ do Congo”, art. cit., p. 151.
33 Voir Queiroz, Maurício Vinhas de, Messianismo e conflito social (A Guerra sertaneja do Contestado 1912-1916), op. cit., p. 319.
34 Ibid. p. 149.
35 Ibid., p. 125.
36 Cf. ibid., “Atributos e funções dos pares de França”, p. 184-186.
37 Queiroz, ibid., p. 184, indique qu’à côté de la HCM, les cavalhadas (dont il sera question ci-dessous) pouvaient aussi avoir joué un rôle dans la création des pares de França.
38 Pour des introductions à cette manifestation populaire, voir Meyer, Marlyse, “Neste Mês do Rosário : indagaçoes sobre congos e congadas”, op. cit., p. 161-169 ; Cirino, Giovanni, “Atuação missionária no Brasil e na África Centro-Ocidental : uma interpretação dos autos catequéticos“, in Dawsey, John ; Müller, Regina ; Monteiro, Marianna ; Hikiji, Rose Satiko (éd.), Antropologia e Performance, São Paulo, Terceiro Nome, 2013, p. 217-234 ; Filgueira de Almeida, Dulce, “Corpo, Cultura e Sincretismo : o Ritual da Congada”, Pensar a Prática, vol. 15, nº 1 (2012), p. 22-36 ; Cezar, Lilian Sagio, “A santa, o mar e o navio : congada e memórias da escravidão no Brasil”, Revista De Antropologia, vol 58, n° 1 (2015), p. 363-396 ; Bastide, Roger, Les religions africaines au Brésil. Contribution à une sociologie des interpénétrations de civilisation. Paris, PUF, 1995 [1960], p. 479-483.
39 Voir le documentaire en 6 volumes à propos de cette congada, produit par TV USP, disponible en ligne, https://www.youtube.com/watch ?v =CpCuk441ZCw [consulté le 17/10/2019].
40 Voir Filgueira de Almeida, Dulce, “Corpo, Cultura e Sincretismo : o Ritual da Congada”, loc. cit., p. 23.
41 Voir Meyer, Marlyse, “Neste Mês do Rosário : indagaçoes sobre congos e congadas”, loc. cit., p. 162.
42 Cirino, Giovanni, “Atuação missionária no Brasil e na África Centro-Ocidental : uma interpretação dos autos catequéticos”, loc. cit., p. 226.
43 Voir Bastide, Roger, Les religions africaines au Brésil. Contribution à une sociologie des interpénétrations de civilisation, op. cit., p. 482.
44 Cf. Andrade, Mário de, Danças dramaticas do Brasil, Belo Horizone, Itatiaia / INL / Fundação Pró-Memória, 1982, t. 1, p. 102-104 ; et “Os Congos”, Danças dramaticas do Brasil, Belo Horizone, Itatiaia / INL / Fundação Pró-Memória, 1982, t. 2, p. 17-48.
45 Meyer, Marlyse, “Tem Mouro na Costa ou Carlos Magno ‘Reis’ do Congo”, loc. cit., p. 149.
46 Voir Meyer, Marlyse, “Neste Mês do Rosário : indagaçoes sobre congos e congadas”, loc. cit., p. 162.
47 Voir Suard, François (éd.), Aspremont. Chanson de geste du XIIe siècle, Paris, Champion, 2008 (Champion Classiques. Moyen Âge), qui annonce cet événement majeur du récit dès son prologue : “Or vos dirai d’Yaumont et d’Agoulant, / Et d’Aspremont ou li estors fu grant, / Si com li rois adouba Rollant / Et il li ceint a son costé le branc, / Ce dist la geste Durendart la trenchant, / C’est la première dont il onques fist sanc, / Dom il ocist le fil roi Agoulant.” (Je vais vous parler d’Eaumont et d’Agoulant, et d’Aspremont où la bataille fut terrible ; je vous dirai comment le roi adouba Roland et lui ceignit la lame au côté — c’était, dit la geste, Durendal la bien tranchant, celle par qui, pour la première fois, il fait couler le sang en tuant le fils du roi Agoulant. ”, trad. François Suard).
48 Voir Cirino, Giovanni, “Atuação missionária no Brasil e na África Centro-Ocidental : uma interpretação dos autos catequéticos”, loc. cit., p. 230.
49 Cf. ibidem, p. 229.
50 Cf. Bastide, Roger, Les religions africaines au Brésil. Contribution à une sociologie des interpénétrations de civilisation, op. cit., p. 482.
51 Cf. ibidem, p. 479 sq.
52 Les photos des cavalhadas de Pirenópolis, Goiás, en donnent quelques beaux aperçus : https://pirenopolis.tur.br/cultura/folclore/festa-do-divino/cavalhadas [consulté le 17/10/2019].
53 Voir la présentation de la cavalhada de Pirenópolis sur le canal YouTube de la Chambre des Députés : https://www.youtube.com/watch ?v =SJjL2CO_8h4 [consulté le 17/10/2019].
54 Le corpus sur lequel nous travaillons actuellement se compose de :
55 Melo, Veríssimo de, “Literatura de Cordel. Visao historica e aspectos principais”, Literatura de cordel. Antologia, Fortaleza, Banco do Nordeste do Brasil, 1994, p. 15.
56 L’adjectif catimbozeiro renvoie au catimbó, la fumée qui encense les assistants à un rite magique mêlant éléments indiens, africains et chrétiens. Magomas est un terme plus compliqué à traduire : le magoma est d’une part une langue africaine parlée en Tanzanie ; le contexte semble cependant référer à un objet utilisé lors du culte et une confusion avec la macumba est probable. Cette dernière désignant un instrument de musique africain, et par extension les rites afro-brésiliens et leurs pratiques, avec une possible connotation dépréciative, nous prop
57 Kunz, Martine, “Cordel, criaçon mestiça”, loc. cit., p. 28.
58 Nous remercions M. Altamiro Belmiro Rocha Neto pour ces précieuses suggestions.
59 Severino José, A Grande Paixão de Carlos Magnos pela Princesa do Anel Encantado, s. l., s. d., relate l’amour prodigieux de Charlemagne pour sa quatrième épouse, prolongé au-delà de la mort de celle-ci par l’enchantement que produit un anneau magique.
60 BOF, p. 5 : “Todos eram conhecidos / Pelos Leões das Igreja, / Pois nunca foram à peleja / Que nela fossem vencidos. / Eram por turcos temidos, / Pela Igreja estimados, / Porque, quando estavam armados, / Suas espadas luziam / E os inimigos diziam : / — Esses são endiabrados !” (“Tous [les Douze Pairs] étaient connus / Sous le nom de Lions de l’Église, / Puis ils n’allaient jamais en bataille sans en sortir victorieux. / Ils étaient craints par les Turcs, / Par l’Église estimés, / Parce que, quand ils étaient armés, / Leurs épées luisaient / Et les ennemis disaient : / Ceux-là sont endiablés !”).
61 C’est le reproche fait par les censeurs, cf. le site Documentos revelados d’Aluízio Palmar, produit par l’éditeur Gramp, Foz do Iguaçu, https://www.plural.jor.br/documentosrevelados/repressao/veto-a-musica-de-belchior-e-exemplo-de-ignorancia-cega-da-censura/ [consulté le 16/10/2019]. Les documents de censure sont datés du 15 août 1977, hasard historique intéressant : c’est le 1199e l’anniversaire de la Bataille de Roncevaux. L’argument : “A última “estrofe” da música em questão transmite uma idéia depreciativa a respeito do viver no Brasil, com a afirmação de que atualmente seria melhor a vida em outros países.” (“La dernière strophe de la chanson en question transmet une idée dépréciative concernant la vie au Brésil, affirmant qu’actuellement la vie serait meilleure en d’autres pays.”).
62 Meyer, Marlyse, “Tem Mouro na Costa ou Carlos Magno ‘Reis’ do Congo”, art. cit., p. 158.
63 Morgado, Georgia Barbosa, “A Permanência do Imaginário Medieval na Literature de Cordel”, in (éd.) Silva, Andréia Cristina Lopes Frazão da et Silva, Leila Rodrigues da, Atas da IV Semana de Estudos Medievais do Programa de Estudos Medievais da UFRJ, Instituto de Filosofia e Ciências Sociais da UFRJ, de 14 a 18 de Maio de 2001, Rio de Janeiro, Programa de Estudos Medievais, 2001, p. 216-224, ici p. 223.
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Pour citer ce document
Quelques mots à propos de : Beate Langenbruch
ENS Lyon – CIHAM (UMR 5648), membre associé du CÉRÉdI (EA 3229)
Beate Langenbruch est spécialiste du domaine épique médiéval français. Sa thèse de doctorat est consacrée aux Images de l’Allemagne dans quelques chansons de geste françaises des XIIe et XIIe siècles. Elle a codirigé “Cel corn ad lunge aleine !”. Mélanges en l’honneur de Jean Maurice, avec Hubert Heckmann et Nicolas Lenoir, Rouen, PURH, 2016. Dans ses récents travaux, elle s’est tournée vers la réception de la matière de France dans la littérature de cordel brésilienne.